Le nom vous est bien sûr familier, celui du grand gaillard
rouquin et barbu qui a amusé avec ses chansonnnettes nos
tendres et jeunes années sur Récré A2 et TF1
aux côtés de Dorothée ! Mais Corbier c'est un
peu plus que ce drôle d'animateur pour marmots, c'est avant
tout un grand chansonnier dans la lignée de Brassens,
Ferré, Renaud avec dans le regard et la voix
une touche satirique et humoristique sur notre société,
notre vie de tous les jours... Le revoilà... avec un nouvel
album "Tout pour être heureux"!
Laguitare.com:
Bonjour Corbier, merci de nous accorder une interview et de nous
faire partager tes dernières aventures ! Quel plaisir de
te retrouver aussi présent, que ce soit sur le petit écran
(Ruquier, Delarue, Jacky...) ou sur les scènes du Printemps
de Bourges, la Sorbonne, La Fèche d'or, dans toute la France,
en Belgique, en Suisse... Est-ce un retour, un travail assidu de
tous les jours ? Parle nous de ton chemin depuis l'épopée
Dorothée.
Corbier : Lorsque je me suis aperçu que j'étais
le dernier survivant de la catastrophe méningée qui
a emporté mes camarades, dont Dorothée, Ariane, Jacky,
Patrick et le Père Noel, je me suis dit : "Mon gars
il est temps que tu te mettes au travail !" Là dessus
je me suis acheté une guitare et j'ai appris à souffer
dedans. Simultanément j'ai apris à lire et dans la
foulée je me suis mis à écrire des chansons
dont La Marseillaise, et un peu plus tard l'Hymne à Zizou
!
LG.com: Ton nouvel album "Tout pour être heureux"
est joliment écrit ! Les textes, sous une apparente légèreté
sont en fait un réel regard sur les maux de notre société,
voir même un baûme. A l'écoute de ton cd, on
retrouve le sourire, on aime presque son voisin... on réfléchit
à sa p'tite vie de tous les jours: tu parles de politique,
d'extrémismes, de guerres, de téléréalité,
de publicité, du temps passé, de la cigarette, d'Amour,
du travail, de la vieillesse, de la mort... es-tu philosophe, poête
humoriste, un anticorps à la morosité, ou autre...?
"Bien sûr Al Qaida, Irak et l'oncle Sam,
De la fièvre et du sang, des prières et des larmes
Pourtant y a tout pour être heureux, tout pour être
heureux,
Dans la publicité nos dames ont des règles bleues".
Corbier
Corbier : En fait je ne l'ai pas fait exprès. Je voulais
écrire un roman qui aurait raconté les aventures d'un
mousquetaire et de ses trois copains dans la jungle : Les Trois
Tarzan.
Hélas, j'ai perdu le manuscrit dans le métro et comme
il fallait que je gagne mon maigre pain, je me suis dit : "
Mon garçon tu as le choix : ou tu fais de la boxe, ou tu
fais chanteur !" Comme à côté de mon domicile
il y avait un bistrot avec un juke box, j'ai compris que le ciel
me faisait un signe et qu'il fallait que je me mette à la
boxe ! Et j'ai pris des cours de champs car c'était à
la campagne.
LG.com
: Tu as sorti précédemment 2 autres albums: "Carnet
Mondain" et "Toi, ma guitare et moi", le 3ème
est bien plus arrangé : tu t'es entourré d'une fine
équipe de musiciens et de nombreux instruments, peux tu nous
parler un peu plus d'eux ? Recherchais-tu d'autres couleurs, d'autres
ambiances, d'autres idées ?
Corbier : J'avais décidé d'enregistrer seul ce
nouvel album, mais mes copains Gérard Geoffroy (flûtiste
de Idir) Patrick Balbin (guitariste de Lenormand) et Eric
Gombard (multi-instrumentiste et guitariste de moi) m'ont convaincu
qu'il était temps d'instrumentaliser mes chansonnettes. Je
les ai laissé faire mais il a fallu qu'ils me payent pour
que le disque sorte dans cet état. D'autres musiciens qui
avaient été contactés pour participer à
cette aventure se sont défilé le 14 Juillet et s'en
mordent encore les doigts.
LG.com : Ce nouveau disque me semble plus optimiste ?
Corbier : Ce disque n'est pas d'une profonde tristesse, mais
de là à dire qu'il est optimiste est à mon
sens une vue de l'esprit. Les arrangements sont joyeux et beaux,
mais on devine tout de même derrière les mots une sorte
de désespoir. Enfin, c'est comme ça que je le ressens.
J'en ai parlé dernièrement avec un ami qui s'est suicidé
deux heures après avoir écouté d'une traite
l'album. Je ne veux pas y voir un signe, mais je n'ai plus guère
de nouvelles de plusieurs copains qui m'avaient commandé
ce CD.
LG.com : Je me souviens des émissions pour enfants où
tu chantais accompagné de ta guitare, tu devais être
le seul animateur guitariste du petit écran que nous, les
mômes, entendions ! Peut être qu'inconsciemment plein
de gosses ont joué de la guitare grâce à toi
!? ou à cause ? (rires)... Comment es-tu entré avec
ta gratte dans notre écran ? J'ai cru comprendre que ton
premier métier était chansonnier; tu écrivais
beaucoup de textes et même Brassens et Le Forestier t'ont
encouragé!
Corbier : Bon alors voilà : En fait, j'écris des
chansons depuis 1961 et peut-être même avant ça.
J'avais écrit quelques chansons que je suis allé montrer
à Brassens, c'était un truc qui se faisait à
l'époque, on allait en coulisses du music hall où
passait la vedette à laquelle on désirait montrer
notre travail, et on chantait nos oeuvreuttes. Brassens n'ayant
pas vômi en m'écoutant j'en ai conclu que ce ne devait
pas être si mal que ça.
J'ai appris que depuis il était mort, mais je n'y suis pour
rien.
J'ai fait quantité de cabarets, je suis allé chanter
au Québec, en Afrique, en Amérique Latine j'ai fait
l'Olympia, et puis un jour de l'année 81, la maman d'Antoine
Decaunes (Jacqueline Joubert) m'a vu dans un théâtre
de chansonniers qui n'existe plus je crois (Le Caveau de la République)
et elle m'a demandé de participer à des émissions
de télévision destinées à la jeunesse
en compagnie de Dorothée : Récrée A2. Je ne
savais pas qui était Dorothée, mais j'ai accepté
avec enthousiame, persuadé que ça ne durerait que
quelques semaines... En fait j'y suis entré le premier mercredi
de Janvier 82 et j'en suis sorti, volontairement en 96. Soit au
bout de quatorze années. Mon avocat était un minable
! Je n'aurais pas du faire plus de six mois.
LG.com
: Depuis quand joues tu de la guitare? tu as un jeu "picking"
simple et efficace, comment es-tu venu à cette technique
? Marcel Dadi ? des guitaristes américains ? Tu as une manière
bien à toi de conter les évênements de la vie,
accompagné par ta guitare, comme le faisait les guitaristes
folk-blues. Peux-tu nous parler de tes inspirations musicales ?
Corbier : Si les questions deviennent sérieuses, je vais
être obligé de m'appliquer. En fait au début,
je pensais que la guitare servait uniquement pour jouer au ping-pong.
J'ai emprunté un filet à mon boucher et je me suis
lavé les oreilles. J'avais seize ans. Mon rêve aurait
été de jouer de la guitare comme Claude Debussy,
mais je n'ai jamais réussi à obtenir son adresse.
Un jour alors que j'écoutais les images de la radio, j'ai
vu jouer Mississipi John Hurt, et je me suis rendu compte
qu'il ne soufflait pas dans la guitare comme je m'y essayais depuis
plusieurs semaines, sans grands résultats d'ailleurs, mais
qu'il plaçait ses doigts sur les cordes et qu'en les pinçant
ça faisait des jolis bruits. Quelques temps plus tard je
me suis aperçu que Marcel Dadi faisait la même
chose et que ça rendait là aussi des jolis bruits.
Alors je me suis acheté des cordes, et j'ai essayé
de reproduire ce que j'avais entendu. Au début, comme je
ne jouais pas très bien, pour qu'on n'entende pas le son
de ma guitare, je me suis mis à raconter des trucs avec ma
bouche et quelqu'un m'a dit que ça s'appelait des chansons
! Hélas la Stard Ac n'était pas encore inventée...
alors j'ai travaillé avec l'espoir de m'améliorer.
LG.com : Pour toi, la guitare est-elle un outil de composition
? trouves-tu d'abord une mélodie, un balayage qui te sert
de base ou bien écris-tu tes paroles sur lesquelles viennent
se poser accords et notes ?
Corbier : Je m'amuse à faire des suites harmoniques et
j'invente des histoire qui se collent dessus. Quand j'ai trouvé
puis écrit toute l'histoire, je refais une musique et dans
ces cas là le texte ne colle plus et je le refais...
C'est vrai ! Je ne compose pratiquement qu'avec la guitare. J'ai
essayé fut un temps avec des cimbales, mais ce n'était
pas très harmonieux et on n'entendait pas ce que je chantais.
J'ai vite laissé tomber.
LG.com:
Tu joues du ukulélé dans le morceau "Règles
bleues" qui ouvre l'album; comment es-tu venu à ce joli
petit instrument hawaïen ?
Corbier : Je suis très grand. Enfin, pas petit. Je mesure
un mètre quatre vingt quatre les jours de pluie. Un jour
j'ai vu un ukulélé dans la vitrine d'une boutique.
Je suis entré dans le magasin persuadé qu'on allait
me le vendre avec Marilyn Monroe. J'ai payé et je
me suis fait avoir. En sortant de la boutique, j'étais seul
avec un tout petit instrument pour un très grand corps. Rentré
chez moi, j'ai composé une chanson sur cet outil, mais ça
n'a pas fait venir Marilyn. Je le regrette bien, mais d'un aute
côté le uke n'était pas cher et on ne peut pas
se plaindre sans arrêt.
LG.com : Parle nous un peu de tes guitares et des autres instruments
utilisés sur l'album.
Corbier : Nous avons utilisé :
Deux basses électriques, un accordéon, un piano, des
percussions, de la guitare électrique, de la guitare classique-jazz-picking,
un charengo, des flûtes, un violoncelle, des choeurs en pagaille
(femmes, enfants, hommes) et un chat que nous avons du étrangler
pour qu'il donne exactement la couleur que nous cherchions avec
l'ingé-son Jean-Claude Bodot.
Je joue sur des guitares qui n'ont plus d'âge. Une Adamas
demi-caisse, une Elecorde de chez Aria - un modèle
qui ne doit plus exister aujourd'hui - et la Silent Guitare de chez
Yamaha. Je joue avec des cordes Elixir 11/52. J'ai en outre
la chance de fréquenter Benoit
de Bretagne qui me prète ses instruments. Je n'ai
qu'un regret : Il ne veux pas que je les lui vole ! C'est vache
de sa part car ses guitares sont des merveilles et je n'ai pas les
moyens de les lui acheter ! Salaud !!!
LG.com: Je sais que tout le monde te parle sans cesse de la période
où tu étais animateur au "Club Dorothée";
14années d'une vie, c'est quand-même quelque chose
! un règne ou presque trois mandats présidentiels
! Les "tubes" de l'époque "sans ma barbe,
quelle barbe...", "le nez de Dorothée", ou
encore "laissez les mamies faire" sont ils des morceaux
que tu joues encore? La chanson pour enfants, c'est vraiment fini
? Comment vis-tu l'admiration nostalgique que te vouent les "grands
enfants" d'une trentaine d'années qui viennent te voir
en concert ?
Corbier : Je considère qu'il est extrèment
flatteur d'être aimé pour des petites chansonnettes
sans prétention comme celles que j'ai eues le plaisir de
composer et de chanter à l'époque. Néanmoins,
la vie ne s'est pas arrêtée en 1993, et j'ai continué
mon bonhomme de chemin. Je ne passionne pas les radios ni les télévisions,
mais comme à l'époque où j'étais à
la télé je ne les intéressaient déjà
pas, je ne me sens pas brimé outre mesure... Je ne chante
plus ces chansons qui désormais appartiennent au public.
Parfois des jeunes me demandent l'autorisation de les ré-interprèter,
de les transformer en dance, en rap, en musique électronique
en hard rock... Faites ce que vous voulez. Amusez vous avec ces
chansonnettes elles sont à vous, pour vous.
Je fais d'autres chansons aujourd'hui... Des chansons à résonance
sociale, de la satyre. Quelque chose qui pourrait se situer du côté
de Brassens, Perret, Dylan ou Renaud.
Un peu folk, un peu blues, une sorte de répertoire pour ceux
qui ont des neurones entre les oreilles. Pas des chansons pour les
pieds.
Rassurez vous ce n'est pas dangereux. On peux s'y frotter sans préservatif.
Je les compose pour celles et ceux qui aiment les mots. Et il parrait
même que parfois ça plaît ! Dingue non ?...
LG.com : Tu as un très joli site internet: www.francoiscorbier.com,
fort fourni en anecdotes cocasses ! C'est bien sympa de pouvoir
écouter ou redécouvrir tes anciens morceaux ou albums
(rubrique Discographie) même une newsletter "le petit
Corbinou" qui narre tes voyages, concerts, animés de
sentiments et coups de gueule... on a vraiment l'impression que
ce métier de chansonnier tu le vis chaque seconde, comme
une vocation ? Serait-ce le plus joli métier du monde à
tes yeux ?
Corbier : J'ai la chance à 62 ans bientôt d'avoir
un public gentil qui m'écoute, ri et pleure avec moi. J'ai
fait quasiment le tour du monde avec ma guitare. J'ai rencontré
les gens que j'admirais lorsque j'étais enfant. On me reconnait
un certain talent... Alors même si les fins de mois ne sont
pas toujours à la hauteur de mes espérances, ce serait
bien con de ma part d'aller me plaindre alors que je connais des
types qui ont cent fois plus de talent que moi et ne connaîtront
jamais le dixième de ce que j'ai pu vivre.
Cependant, je déconseille aux jeunes gens qui veulent faire
ce métier de débuter en soufflant dans un piano à
queue. C'est lourd et ça n'intéresse personne !!!
Roméo le 21/07/2006
Ses
prochains concerts
Quelques sites parlant de Corbier:
http://corbier04.skyblog.com/
http://membres.lycos.fr/corbier/corbier/c_menu.htm
(même une vidéo: "Les Epinards" !)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_Corbier
son site internet :
www.francoisCorbier.com
contatct : francois.corbier@wanadoo.fr
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