Oshen
poursuit son envol.
Au fil de son
épisode Dom Juanesque, on a cru cerner la pétillante
Oshen. Une chose est sûre, on n'a pas fini de savourer la
délicatesse du style de la demoiselle. Sept années
de scène n'ont pas entammé sa fraîcheur. Son
deuxième album « Je ne suis pas celle » est dans
les bacs depuis le 21 avril.
Qu'est-ce
qui a fait que l'écriture soit plus personnelle sur ce disque
?
Oshen
: Pour le premier album, on choisit les meilleures chansons qu'on
a fait pendant huit ou neuf ans. En les écrivant, on est
loin de penser à un disque. Alors qu'au deuxième disque,
on pense pendant l'écriture à construire un univers.
C'est vrai que « Je ne suis pas celle» est un peu construit
comme un roman avec des chapîtres. Il y a des moments plus
tristes et d'autres gais.
Ce mélange de mélancolie, de douceur et d'humour
est-ce votre côté operette ?
Oshen : (rires) Même dans les moments tristes, il y
a toujours un petit trait d'humour. Jamais de premier degré
pur et dur. Dans chaque chanson, il y a toujours quelque chose qui
me tient à coeur. Il y a toujours un mélange de sérieux
et d'autodérision. La couleur dominante de l'album est la
tendresse. Le message de fond est plutôt positif dans l'énergie
même s'il y a une vraie lucidité et parfois une pointe
de cynisme.
Le mythe de la femme moderne s'effondre avec la scène
de la veste avec Jim. Pourquoi ce choix de mise en scène
?
Oshen
: Cette chanson part de l'idée des filles que les mecs ne
disent jamais non. Il arrive aux hommes juste d'aller boire un café
chez une fille. Et que la fille lui saute littéralement dessus.
C'était drôle et intéressant d'en parler. Cette
situation parle beaucoup plus qu'une fille qui drague un mec. On
l'a assez peu entendu. Elle est toute réaliste et contemporaine.
La petite intro vient de mon envie d'avoir un côté
cinéma avec la mise en scène. La fille se prépare,
l'accueille. Elle est à fond sur lui et se dit qu'elle va
l'avoir (rires)
Comment
s'est faite cette rencontre avec Vincent Segal qui a réalisé
l'album ?
Oshen : Pour ce deuxième album, on cherchait un réalisateur.
C'est ce qui avait manqué sur le premier disque. C'est en
discutant avec Franck Monnet que j'ai appris que Vincent Segal avait
réalisé les « Embellies ». J'adorais déjà
Vincent en tant que musicien. Mon directeur artistique chez V2 a
eu la même idée. J'ai écouté d'autres
albums qu'il avait réalisé notamment celui de Piers
Faccini. J'aime son parti pris de faire quelque chose de très
dépouillé et minimal. Ma maison de disque a permis
cette rencontre. Après de longues discutions sur la manière
d'enregistrer, on s'est mis à travailler ensemble.
A
quel niveau Vincent Segal a-t-il influencé l'album ?
Oshen
: Cela a joué surtout dans la manière de travailler,
dans l'organisation du travail. Evidemment dans le son aussi. Il
a une très grande expérience. Mais sur le fond, on
a la même vision des choses. Lui comme moi avons des influences
très variées. Je n'écoute pas du tout de chanson
française. J'écoutais Fela Kuti, des chanteuses comme
Nina Simone, Billy Holliday et des groupes comme PJ Harvey, Radiohead.
C'est sûr, mes influences sont très éloignées
de Brassens ou de Barbara. Il y a beaucoup de couleurs sur le disque.
«La première fois que tu m'as quittée »
est plus bossa, alors que « En visage» est plutôt
jazz. Comme je n'écoutais pas de chanson et que je fais de
la chanson, je ne décide pas de m'inscrire dans une tradition
. Mais je prends toutes ces influences. Du coup les couleurs sont
présentes sans en faire un catalogue. Cela reste toujours
de la chanson mais avec des couleurs. Grâce à sa très
grande culture musicale, Vincent nous a amené à toujours
bien faire dans un style sans jamais caricaturer ou dénaturer
tout en trouvant toujours un son à nous.
Avec autant de couleurs sur le disque, comment arrivez-vous à
ce son homogène ?
Oshen
: On a enregistré seulement en dix sept jours. On était
peu de musiciens tout le temps dans la même pièce.
Cette cohérence du son vient de là. Vincent ne voulait
n d'enregistrements espacés ni de pistes refaites plus tard.
Qui a lancé l'idée de ce duo avec Anaïs ?
Oshen
: Depuis plus de cinq ans, nous sommes copines avec Anaïs.
Comme j'habite à Marseille et elle aussi. On s'est connu
à l'époque où elle jouait avec Opossum, groupe
dont Christophe Rodomisto était le guitariste. Mais son explosion
n'a rien changé à notre amitié. On s'est toujours
débrouillée pour jouer ensemble. Au début,
elle faisait mes premières parties après c'était
moi. Alors sur la tournée, on a eu envie d'un morceau écrit
pour nous avec lequel je revenais sur scène. On a eu envie
de le mettre aussi sur le disque. C'était une vraie histoire
et pas un duo fabriqué. L'écriture est le contre-pieds
des chanteurs qui se mettent dans des rôles. Là, ce
sont vraiment Anaïs et Oshen qui se racontent leurs dernières
conquêtes amoureuses. Quand elles se rendent compte que c'est
le même mec, elles s'en foutent pleins la gueule. Il y a une
caricature du monde artistique, de la chanteuse hyper narcissique
et plus généralement de la nana du showbiz hypocrite.
On découvre
une vraie funambule vocale. Quel est votre secret ?
Oshen : J'ai beaucoup travaillé. Lorsque j'ai commencé
à chanter, j'ai pris quelques cours vers seize ans. Plus
tard j'ai continué de façon ponctuelle. En arrivant
à Marseille il y a neuf ans, je me suis mise à fond
dans la musique. Je chantais toute la journée. Comme j'avais
forcé, je me suis fait un ovulse, une cloque des cordes vocales.
Beaucoup de chanteurs connaissent ce genre de problème notamment
les chanteurs lyriques. Alors j'ai du faire de la rééducation
avec un phoniatre, un orthophoniste des cordes vocales. Avec trois
ans de rééducation, j'ai du revoir le geste vocal
à la base. Depuis deux ans, je travaille avec Claudia Philips
du Studio des Variétés. Elle m'a beaucoup aidé
sur la technique grâce à son expérience scénique.
On a toujours besoin de la technique. J'adore prendre des cours.
Je serais ravie d'en prendre toute ma vie. Les chanteurs disent
rarement qu'ils sont coatché alorsqu'ils sont très
nombreux. Ce n'est pas le coatch qui écrit les textes et
monte sur scène. Vincent Ségal est une super rencontre
car c'est un très grand bosseur. Bien qu'il joue depuis plus
de trente sept ans du violoncelle, chaque matin il travaille quatre
heures sa technique. C'est une vraie leçon. Il se remet sans
cesse en question.
Quelle est la formation sur scène ?
Oshen
: Nous sommes quatre sur scène. Christophe Rodomisto à
la guitare, Tatiana Mladenovitch à la batterie et Thibaut
Frisoni à la deuxième guitare et à la basse.
Comme je joue un peu de basse sur deux morceaux, on se passe les
instruments. On avait envie de garder l'idée d'un univers
dépouillée comme l'énergie sur scène
est plus rock et rentre-dedans. L'écoute du disque est plus
intime chez soi alors que sur scène l'envie de partager et
la décharge d'nergie domminent. Avec mes musiciens on se
retrouve sur ce même rapport du travail au son.
Propos
receuillis par Emmanuelle Libert
le 31 05 2007
OSHEN «
Je ne suis pas celle » (V2 Music)
www.oshen.info
www.myspace.com/oshenlachanteuse
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