A
la sortie de Ta-dah, leur deuxième album, les Scissor
sisters s'offraient la couverture de Télérama,
tout en glamour, en poses et en couleurs. En technicolor même,
avec un sens vestimentaire à faire regretter de s'être
débarrassé de ses plus belles tenues disco, d'époque
s'entend. Manière sans doute de relooker définitivement
la mise en page de cet hebdo préféré des bobos
et des instituteurs, et qui lorgne désormais dans sa mise
en page vers une version plus proche de technikart que du catalogue
de la Camif. Tout cela pourrait paraître anecdotique mais
une couv' n'est jamais prise à la légère, c'est
même pour ainsi dire, le dernier endroit où commettre
une erreur. Les Scissor sisters sont dans leur époque, ils
sont l'époque, de la futilité dans un monde de brutes.
Ils sont cette petite partie d'inutile qui les rend absolument indispensables
dans le paysage sonore actuel et qui écarte d'emblée
tous les pires revivals possibles de la génération
disco, ceux par qui la reformation inenvisageable d'Abba
ne peut plus arriver, ou alors trop tard. Abba, qui depuis des années
refuse tous les ponts d'or pour regarder de haut les formations
" tribute " s'échiner sur leurs standards, de Waterloo
à Money, et faire salle comble à chaque fois. Abba,
qui se laisse rançonner par une Madonna en manque
d'inspiration, qui se contente de spoiler le fond de commerce. Les
Scissor sister ne se la jouent pas disco, mais jouent glamour, empruntant
tour à tour les sons de la pop anglaise foisonnante de Bowie
ou Elton John (à l'époque à laquelle
on l'appelait plutôt sur Elton que Sir Elton, et qui
vient prêter main forte à ses enfants illégitimes
sur Intermission et I don't feel like dancin'), les foix falsetto
des Bee Gees, la guitare de Mott the hoople, et la
batterie des Stones version Miss you (four on the floor disait
Charlie Watts, les quatre temps au sol, bien marqués),
et l'attitude qui va avec. Un grand délire régressif
et joyeux qui fait de chaque morceau un tube à danser, et
sur lequel on pourra échanger les partenaires et emprunter
le rouge à lèvres de sa voisine
ou de son voisin.
Moins potache que le premier album qui reprenait le confortably
numb des Floyd dans une version inavouable, ce second chapitre
de leurs aventures les inscrit en personnages incontournables de
la Fièvre du samedi soir, un registre dans lequel personne
ne s'était réellement risqué avec talent depuis
Frankie goes to Hollywood. On peut maintenant sans gêne
ressortir les " rouges délicats " et s'en aller
chanter " she's my maaaan, and we got all the balls we need
"
..
Stephane
Andrieu le 12/10/2006
Sites
Internet
|