Berlin,

Une ville facile d'accès, riche en culture, riche en artistes, riche en fête, et ce week end du 8 novembre, riche en lutherie.


En effet, samedi 8 novembre avait lieu la conférence de presse organisée par l'association European Guitar Builders pour annoncer un grand événement, The Holy Grail Guitar Show, un salon de guitare à dimension européenne organisé par EGB. Cette volonté, cette dynamique commune vient de quelques luthiers européens qui ont fondés cette association en 2013.

Pour mieux connaître le bureau d'EGB, je vous invite à consulter cet article.

Comme le dit Michael Spalt, president d'EGB, il fallait une association mobilisant les luthiers du continent. Aux Etats-Unis, la guilde des luthiers est extrêmement solide et organisée, et explique en partie le succès des luthiers nord américains. Toutefois, la difficulté en Europe s'explique par plusieurs points : c'est une union de pays aux langues, aux moeurs et aux habitudes différents. Les taxes, frais d'exportation et d'importation sont également variables en fonction des pays. Mais la guitare vient d'Europe, la tradition des belles six cordes viennent de notre continent, et la profession doit se mobiliser pour travailler en harmonie avec la tradition tout en continuant à innover et faire de nos luthiers des précurseurs connus et reconnus pour la qualité de leurs productions.

De ce constat, The Holy Grail Guitar Show est né, dans le but de créer une plateforme pour favoriser l'exposition européenne, en mettant à profit les expériences de chacun, provenant des différentes expositions auxquelles les luthiers ont participé. Une forte mobilisation est nécessaire pour que ces objectifs aboutissent, qu'un esprit de partage et de fraternité immerge au coeur d'une profession soumise à une forte pression ; le marché de la lutherie européenne est quelque peu instable et, pour certains, les autres luthiers ne sont pas des collaborateurs mais des concurrents mettant en péril leur activité.

Frank Deimel, vice trésorier d'EGB insiste sur le fait que ce n'est pas la bonne attitude à adopter. Il faut mobiliser les membres de la profession, mutualiser les connaissances par le biais d'ateliers de travail, préférer l'échange à l'enfermement, en somme créer une connaissance et une intelligence collective.

Juha Ruokangas, vice président d'EGB et président de la guilde finlandaise des luthiers explique que la lutherie a grandement évoluée ces 20 dernières années, et que la mobilisation est un facteur clé. L'industrie prend le pas sur la production artisanale, et une union est tout simplement indispensable.

Les artisans luthiers ne doivent pas suivre les lois de l'industrie, tout simplement parce qu'ils ne le peuvent pas. Prenons par exemple le Musik Messe. Cette manifestation est une place de marché qui suit les lois et s'adapte à l'industrie, aux marques internationales. Les luthiers s'y rendent pour profiter de l'aura de cette industrie, et là réside peut-être l'erreur.

Malgré tout, les luthiers disposent d'alliés précieux : les médias, mais surtout les musiciens. Ces derniers désirent d'ailleurs autre chose, et EGB souhaite leur offrir par le biais de ce salon européen, qui aura lieu à Berlin en novembre 2014.

Les luthiers changent le monde de la guitare, et la différence vient d'un facteur clé : le travail à la main.

C'est pourquoi le salon n'accueillera pas de guitares industrielles, ce qui, d'ailleurs, n'intéresse pas les visiteurs de ce type de salon lorsqu'ils s'y rendent. L'objectif est simple : Mettre le public du côté des luthiers, pour que la profession continue à évoluer.

L'équité. Voila le mot au coeur de la démarche d'EBG, et pour preuve, tous les luthiers profiteront du même degré d'exposition, et de la même dimension de surface d'exposition.

Mais la démarche de l'association européenne des artisans luthiers ne s'arrête pas à l'aide économique des facteurs de guitares. En effet, le but est aussi de mobiliser le public et de l'éduquer, lui montrer la valeur ajoutée, qu'il sache pourquoi une guitare faîte main est plus chères, mais aussi pourquoi il faut la choisir, tout simplement parce qu'il n'y a rien de mieux qu'une guitare fabriquée par un luthier expérimenté.

Le but avoué est aussi de conserver et développer la relation intime qu'entretiennent luthiers et musiciens, pour que continue ce rapport intense entre un joueur de guitare et l'instrument fait pour lui. De plus, les jeunes se désintéressent des guitares de luthiers, préférant les grandes marques. Il faut réinjecter la lutherie dans la jeunesse guitariste.

Outre le degré d'exposition de chacun, le lieu de l'événement est également primordial. En effet, pour que l'expérience Holy Grail profite à tous, l'exposition devra se dérouler dans un lieu à l'image des instruments produits : beau, innovant, harmonieux.

N'oublions pas que la guitare est plus qu'un instrument, c'est une histoire, une forte symbolique, une icône de la musique. Le succès de ces dispositifs est primordial : Si la situation ne change pas, les jeunes luthiers européens s'installant aujourd'hui seront, d'ici quelques années, en forte difficulté.

Ces constats poussent les membres du bureau à penser à instaurer un label. Les consommateurs apprécient la mention « Made in USA », pourquoi ne pas apposer aux guitares des luthiers européens la mention « Made in Europe » ?
La mention USA en fait rêver plus d'uns, et pour cause : le marché nord américain est plus important que tous les autres réunis.

L'association n'est toutefois pas dans une démarche de cloisonnement de l'Europe sur ce marché : des luthiers tels que Michihiro Matsuda ou encore Ken Parker viendront exposer leurs instruments à Berlin. L'association souhaite aussi collaborer le plus possible avec les autres associations européennes de la guitare artisanale, afin de mutualiser les savoir. L'APLG collabore déjà avec EGB, et notre président, Fred Kopo, qui est aussi vice-secrétaire de l'association European Guitar Builders, a soulevé les opportunités et les possibilités d'organiser l'une des prochaines éditions du salon européen en France, et plus précisément à Paris.

Ce salon aura d'ailleurs à coeur de regrouper des guitares de tous types, aussi bien en termes de nature (acoustique, électrique…) que de design. Le but n'est toutefois pas d'organiser un salon d'une taille démesurée, mais d'organiser dans un premier temps un salon de taille « humaine » et de miser sur la qualité, aussi bien en terme d'organisation que d'instruments exposés. Cette volonté vient aussi d'un constat simple lorsque l'on s'intéresse au marché des expositions d'instruments : La crise a fait des ravages.

Les luthiers sont conscients de la situation actuelle, mais ne la considère pas comme une finalité : il faut créer une véritable renaissance de la guitare artisanale. Chacun doit apporter sa pierre à l'édifice, et participer à ce renouveau ne doit pas être une contrainte, mais être gratifiant.

Une question sensible reste à aborder : Qui exposera lors du Holy Grail ?

Là est la question, et le bureau devra prendre des décisions pour établir la liste des luthiers qui seront présents, en se basant sur des critères précis. En tous cas, il faudra impérativement être membre de l'association.

Comment la rejoindre ? Il faut tout simplement être européen, recommandé par un membre, approuvé par le bureau, et que la lutherie soit une activité principale; Toutefois, devenir membre actif d'EGB ne garentira pas la présence au salon, car le nombre de places obligera à une selection.

En ce qui concerne nos luthiers, déjà quatre luthiers français, membres de l'APLG, exposeront : Fred Kopo, Jean-Yves Alquier, Pierrick Brua, ainsi que Mickael Springer qui, lors de ce week-end, a été nommé secrétaire d'EGB. Nos sincères félicitations à ce jeune luthier.

Désormais, l'association européenne compte deux luthiers membres de l'APLG au sein de son bureau. N'oublions pas nos amis belges, John et Serge de Tao Guitars, qui étaient présents et exposeront leurs superbes guitares lors du Holy Grail Show.

Ce week end a aussi été l'occasion pour moi de devenir membre associé d'EGB.

Ce week-end fut donc riche en informations. Les bases sont posées, mais la structure reste à édifier. C'est un travail long, difficile, parfois probablement ingrat, mais les luthiers présents ce week-end ont énormément communiqué, partagé, et ri. C'était une belle expérience, un carrefour des cultures et des compétences, illustré par les démonstrations de chaque guitare exposée par de très talentueux musiciens allemands qui nous ont gratifié de leur présence.

Les artisans ont tout simplement aboli la barrière de la langue pour créer une synergie, une entente commune entre les pays représentés par les talentueux luthiers qui avaient fait le déplacement pour ce week end dans la capitale allemande. Ces hommes (et cette femme, une luthière belge était effectivement présente) ont eu l'occasion de faire connaissance, réunis par leur passion pour le métier qu'ils exercent et leur investissement dans le développement de ce dernier.

Un dernier point reste à aborder, et il nous concerne tous, luthiers, amateurs de guitares artisanales, collectionneurs, curieux… Nous devons participer à la communication du salon à venir. Comment me direz-vous ? En en parlant, ou plus simplement en rejoignant la page Facebook officielle de l'événement.

Charles-Henri G.D le 19 décembre 2013 - Le site Web d'EGB - Le FaceBook