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Des instruments à cordes pincées, la guitare est reine et sa suprématie est loin de décliner mais il ne faut pas oublier les princes et princesses qui, peu connus, font partie de l'histoire des instruments et séduisent encore de nos jours musiciens et luthiers.
C'est le cas de cet instrument atypique dont l'origine historique fait sourire : le (et non "la") mandoline-banjo ou banjola. Instrument hybride d'un banjo et d'une mandoline.
C'est le luthier Maxime Morand qui, suite à sa rencontre avec le musicien Christophe P. du groupe Black Woods, s'est lancé dans le projet de réaliser cet instrument, sans plan, ni modèle à étudier.
Voici une présentation détaillée de cet instrument par le luthier Maxime Morand.
Jacques Carbonneaux - le 13 septembre 2012 - http://lowelectric.over-blog.com/
Mandoline-Banjo d'après modèle Pollmann (breveté en 1887)
Un peu d'Histoire…
Cet instrument atypique est un mandoline-banjo, souvent aussi appelé banjola, bien qu'il se distingue des modèles créés aujourd'hui par le luthier américain Victor.
Comme son nom l'indique c'est un cousin dérivé du banjo et on doit son concept à un luthier new-yorkais, August Pollmann, qui entendait réaliser une version plus aristocratique du populaire banjo, en faire un instrument digne d'entrer dans les salons huppés de la bourgeoisie américaine.
C'est pourquoi, il ne garde du banjo que le manche à cinq cordes (avec cette corde dite réentrante) et le diapason. La peau tendue est remplacée par une caisse piriforme qui évoque les contours et les dimensions de la mandoline.
Pour une sonorité plus douce et feutrée, on a substitué aux cordes en acier des cordes à l'origine en boyau. Cette alchimie de caractères si particuliers en fait un instrument qui ne sonne comme aucun autre : du banjo il hérite les possibilités multiples d'accordages, de la mandoline il garde la projection plus boisée et moins agressive que le résonateur, les cordes le rapprocheraient du luth ou éventuellement du saz ou du bouzouki.
C'est d'ailleurs saisissant de voir les styles de musique si différents qu'il a le pouvoir d'évoquer, de la musique country, aux musiques celtiques, orientales ou africaines (juste retour des choses car le banjo vient probablement du continent africain, amené avec les populations esclaves en Amérique). (Voir la deuxième vidéo ci-dessous pour vous donner une idée du son de cet instrument en version vintage. NDLR)
L'idée d'en fabriquer un modèle est venue en découvrant un concert privé du chanteur du groupe Woven Hand, David Eugene Edwards (ex- 16 Horsepower) qui utilise un Pollmann des années 1890.
Intrigué, des recherches ont été menées pour en savoir plus, mais la véritable impulsion est venue d'un musicien qui au même moment cherchait un mandoline-banjo depuis quelque temps ; les modèles du XIXème siècle sont rares, de collection et comme ils ont plus de cent ans, parfois en mauvais état.
Le but était donc clairement de produire un nouveau mandoline-banjo, selon les mêmes caractéristiques, en cherchant à s'approcher au plus près de ce timbre unique, sans aucun plan ou modèle que l'on puisse étudier, sans même pouvoir l'entendre physiquement !
La majeure partie du travail de création s'est porté sur le barrage de la table que j'ai voulu en X mais en restant dans des dimensions assez fines pour ne pas la brider.
Le volume de la caisse est sensiblement plus important que sur les modèles originaux, en hauteur d'éclisses notamment. L'autre point important a été la jonction manche-caisse que j'ai finalement traité en « Bolt-on neck », c'est-à-dire vissé par l'intérieur au niveau du talon.
La taille de la bouche a été revue en conséquence, ce qui a pour avantage d'éviter un son trop compressé et l'amène vers plus de polyvalence.
Je me suis aussi servi des recherches de Roger Siminoff et de Graham McDonald sur le banjo et les mandolines, des exemples pour moi de luthiers qui partagent et diffusent leur expérience pour faire avancer l'ensemble de la facture instrumentale.
L'expérience du musicien, Christophe P., du groupe Black Woods :
J'utilise cet instrument magique depuis plus d'un an à présent.
Le banjola s'est beaucoup « ouvert » très rapidement. Il demeure pour moi une véritable source d'inspiration.
Tant pour un jeu simple et personnel que pour mon utilisation fréquente dans Black Woods. Maxime a réussi à mes yeux et mes oreilles la construction fidèle d'un instrument malheureusement trop confidentiel.
Son timbre très doux m'incite fréquemment à lorgner vers des musiques modales et tribales, vers un blues organique qui m'attire particulièrement.
Ce banjola continue de se bonifier avec le temps : il continue de s'ouvrir et laisse courir un son de plus en plus boisé.
Je serais fortement tenté de vous dire de jeter une oreille sur les vidéos pour vous rendre compte de ce son si particulier.
Merci au luthier pour ce travail, ce temps passé à travailler le bois et suivre ton instinct en t'inspirant des « anciens ».
