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Mini dossier : Guitare celtique - Texte de Pierre Bensusan

Alan Stivell du site www.alanstivell.comAntérieurement, en 1972, un autre coup de foudre: Alan Stivell et son album mythique: Rennaissance de la Harpe Celtique. Dans un autre album de Stivell Live à l'Olympia, Dan Ar Bras et Gabriel Yacoub - ses 2 guitaristes - avec un style très lyrique et élégant,  baignaient déjà dans cet univers et jouaient    électrique et acoustique: Gabriel dans des accompagnements aux doigts et Dan apportait le côté plutôt Rock. Stivell venait de créer un nouveau genre musical qui fusionnait Folk et Rock. Gabriel allait plus tard fonder Malicorne. Dan Ar Bras ouvraient les vannes d'un nouveau courant. Son premier album solo Ys est un classique du genre. Même si la guitare n'est pas au centre, c'est une musique imaginée par un guitariste baigné dans l'univers de Quimper, de la baie de Douarnevez et de la grande Famille Celtique. C'est beau, avec des climats très planants et ses musiciens viennent de tous les horizons. En 1973, j'avais 15 ans et allais à mon premier festival Folk en Bretagne, le Festival de Kertalg où se produisait Stivell mais aussi le groupe Irlandais Planxty. Ils jouaient le soir, devant 12 000 spectateurs. Une panne de courant nous plongea dans l'obscurité, mais Gabriel Yacoub - photo © jeff dantin du site http://www.gabrielyacoub.com/Planxty continua de jouer, en acoustique, une sorte de musique de chambre en plein-air dans le silence d'une seule âme. C'est de ce sentiment unique que j'ai souvent puisé mes sentiments restés vivaces pour cette musique, même si elle fut un choc de l'adolescence et une révélation de mon lien profond avec l'Afrique du Nord, l'Espagne et le Classique. Ma conviction était faite: c'était ce que j'avais envie de jouer, en Fingerstyle  - l'utilisation du médiator étant déjà largement répandue aux USA à travers le Bluegrass et le Country Folk - et  le plus bel hommage que je pouvais rendre à Martin, Gabriel et Dan était de trouver mon propre style. Eux et d'autres ont été comme des phares - Bretons -dans la mer.  Je devenais un autodidacte guidé. J'ai commencé, à travers divers accordages Dan ar Brazouverts, par retranscrire des gigs et reels mais aussi à composer, chanter et adapter plusieurs chansons traditionnelles... Mes autres Guitar Heros - et repères - étaient Doc Watson, John Renbourn, Bert Jansch... John et Bert ne baignaient pas dans la musique Celtique, mais en étaient très proches dans l'esprit.  Doc symbolisait l'emprunt et la re-création aux USA de tout ce qui venait de la vieille Europe Saxonne et Celtique. J'ai eu aussi, en 1974 et 75, la chance de travailler avec le banjoiste Bill Keith. Son style, le Keith style m'a beaucoup inspiré pour développer une approche harpisante des mélodies.  Il y avait aussi à Paris 3 Folk Clubs ou l'on écoutait cette musique et tous ses dérivés: le TMS, le Centre Américain et la Vieille Herbe; c'est dans ce dernier que j'y écoutai Martin Carthy pour la première fois, mais aussi Denis Gasser, qui lui aussi adorait  Carthy et avait trouvé un très beau style  personnel et proche de l'utilisation des claviers.    Je sentais l'immense potentiel qui était d'approcher la guitare sous ce billet et tous les découlements harmoniques, mélodiques, les résonnances sympathiques et l'utilisation de cette sonorité dans d'autres formes musicales.  Mon premier disque: Près de Paris, enregistré pour Cézame en 1974, remportait la Rose d'Or du Festival de Montreux. En 1976, je tournais en Irlande où ils n'avaient jamais entendu un guitariste (très jeune à l'époque) jouer leur musique comme ça - je jouais déjà presqu'exclusivement dans l'accordage de Ré, La, Ré, Sol , La, Ré  (Dadgad). Mes origines orientales et Nord-Africaines, à travers l'emprunt de leur musique, leur parlaient et leur accueil très enthousiaste m'encouragait  dès lors à raconter ma propre histoire.

Aujourd'hui DADGAD est devenu l'accordage Celtique par excellence et ce n'est pas étonnant car dans sa structure à-vide, il donne déjà le mood. On peut y développer aux doigts ou au médiator, un style très mélodique et aussi rythmique avec quelques accords pleins ou partiels. Mais ce n'est pas l'accordage qui fait la musique... A force d'être séduit par les cordes a-vides, on tombe souvent dans l'écueil du trop résonnant. Là, commence la recherche: relier les racines à l'aventure et l'innovation, en respectant l'esprit de l'instrument.

Des guitaristes importants ont complètement ou partiellement baigné dans ce courant et montré qu'ils en avaient capté l'essence - pour la joie des sens. On peut citer, dans les plus influents: Davey Graham, John Renbourn, Nick Drake, Nic Jones, Dick Gaughan, Dave Evans, Tony McManus, Martin Simpson,    Arty McGlynn, Soig Siberil, Jacques Pellen, Don Ross, Pat Kirtley, Steve Baughman, David Surette, etc.  - Pardon pour tous ceux que j'oublie ou que je ne connais pas. Mais pour moi, l'un des monstres sacrés restera John Martin. Sa rendition d'un slow air , à l'électrique, est un des plus grands moments de Guitare Celtique de tous les temps. Imaginez un pub bondé, bruyant, sur fond musical vivant et fourni, quelque part sur la côte ouest dans le County Clare. Petit à petit, le silence se fait pour écouter, à l'unisson, un homme agé dire un long poême. je ré-entends souvent ce silence et cette voix ... C'est aussi cela la Guitare Celtique.

Pierre Bensusan (Chateau-Thierry, le 6/9/02)

 

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