Rechercher sur
laguitare.com
L'annuaire laguitare.com
Newsletter
Services - Publicités
Annoncer - CONTACTS

 

LEBRETON JEAN-NOEL
Coordonnées dans l'annuaire des luthiers
 
Interview - Galerie photos
Rencontre avec Jean-Noel Lebreton par Antoine Leroy

Jean Noël Lebreton est installé à Angers (Maine et Loire) depuis 7 ans.
Gentiment, il me proposa de lui rendre visite dans son atelier afin que je l'interroge.

D'où vient votre passion pour la lutherie ?
Adolescent, je jouais de la guitare puis du violon. Tout à commencé lorsque j'ai entrepris de fabriquer un dulcimer.
A quel moment avez-vous décidé de devenir luthier ?
J'ai eu l'opportunité de faire un stage chez un luthier, Bernard Poulelaouen à Chinon. J'ai décidé de m'y lancer plus sérieusement lorsque je suis rentré dans l'école de lutherie londonienne "The London College of Furniture " de 1989 à 1993.

Jean Noel Lebreton sur la scène laguitare.com/Guitarist à Issoudun 2004 pour présenter le modèle qu'il a réalisé et que Valérie Duchâteau se prépare à jouer.

Qu'avez vous fait une fois vos études terminées ?
Je me suis perfectionné seul en construisant quelques instruments. Je suis également allé visiter des ateliers de lutherie en France, en Espagne, au Brésil afin de me faire une idée plus réelle du métier.

Combien de guitares avez-vous réalisées à ce jour ?
Depuis ma toute première guitare faite à Chinon, environ 90.

Approximativement, combien de temps vous prend la réalisation d'une guitare ?
Ca dépend du modèle, des filets, du vernis choisi, dans une large fourchette je dirais entre 3 et 5 semaines.

Est-ce que la lutherie reste pour vous une passion, bien que devenue activé professionnelle ?
Cette passion n'est sans doute plus de même nature, mais elle reste aussi forte, sûrement plus d'ailleurs.
L'intérêt a changé vers une recherche plus pointue, plus subtile comme par exemple l'intérêt des paramètres acoustiques, l'importance des bois, des épaisseurs des vernis...


Les luthiers français sont-ils reconnus ?
Dans les années soixante, les guitares étaient toutes espagnoles ou américaines.
Certains luthiers français ont beaucoup oeuvrés pour cette reconnaissance internationale et ont acquis une clientèle étrangère importante. Oui, je dirais que la lutherie française est connue et reconnue pour ses guitares haut de gamme.

Qui sont vos clients ?
Je travaille pour des magasins, des professeurs de conservatoire, des musiciens professionnels et des amateurs.
Localement et doucement, ça a démarré; désormais mes commandes se font dans toute la France avec quelques instruments à l'étranger (New York, Canada, La Réunion, le Brésil.)

Comment les conseillez-vous ?
Je peux les conseiller par rapport aux bois utilisés :

- Le cèdre donnera un timbre chaud, rond, doux plus spontané et sensitif.Un son a la fois puissant et léger, plus immédiat.il sera plus stable et moins susceptible de se fendre.Le cèdre arrive a
maturité après quelques mois, alors qu'il faudra 2 ans environ à l'épicéa pour atteindre ce stade.

- L' épicéa aura un son plus clair, plus brillant, donnera plus de force, de sustain et de transparence dans les aigus,il aura une palette sonore très vaste et plus riche.Cependant l'épicéa aura besoin de plus de temps pour acquérir toutes ses qualités.

- L'érable et le noyer ont tendance à être acoustiquement plus transparents que les autres bois dû à leur basse rapidité de son (rapidité a laquelle un matériau transmet l'énergie reçue.) Egalement riche en harmoniques; sonorité vivante, chantante; bas mediums chaleureux.

- Les palissandres indiens et brésiliens ont une très haute rapidité de son. Le son, dur et brillant est très équilibré dans les graves.Les guitares faites de palissandre ont un timbre de "reverb" prononcé causé par des harmoniques sympathiques claires et fortes.

Aussi, nous discutons d'un confort du manche adapté à sa propre façon de jouer.
En matière de sonorité, je travaille selon un idéal personnel suivant mes propres critères, convictions et goûts. De plus, il est très difficile de s'accorder avec un client sur les caractéristiques acoustiques de son futur instrument.

Quelle est la formation type d'un luthier ?
C'est varié: certains sont autodidactes (surtout la génération des années 80), d'autres ont d'abord exercé comme ébénistes. Bien sur, il est toujours très positif de continuer à se former en suivant des formations parallèles comme l'étude de l'acoustique musicale, des études sur le bois, ou encore dans des domaines précis tels que les vernis, les problèmes de résonance (Chadli patterns : l'étude sur le comportement vibratoire des tables d'harmonies*.)
Pour ma part, je lis tout ce qui tombe entre mes mains.

*Ernst Florens Friedich Chladni(1756-1827) utilisait un archet de violon et un assortiment de sable et poudres pour étudier les vibrations de tables rectangulaires.Cette méthode est maintenant dépassée puisque l'on utilise aujourd'hui un ampli connecté a un générateur d'ondes et un compteur de fréquences.Le sable s'entassera aux endroits immobiles de la table.Les photos obtenues par ordinateurs en laboratoire seront bien sur plus précises .Ces données pourront être intéressantes et utiles pour comprendre les différences entre deux barrages différents par exemple.

Beaucoup de luthiers témoignent de la difficulté de vivre en exerçant ce métier, existe t-il une rivalité importante entre vous ?
Il faut savoir que beaucoup de luthiers ont des spécialités et des clientèles différentes (classiques, flamencas, arch-top Jazz, Jazz manouche, électriques..), nous ne sommes donc pas directement concurrents entre nous.
De plus, je dirais qu'un bon nombre de luthiers partagent leurs idées, se conseillent…
On peut dire que la concurrence reste assez faible mais cependant inévitable : le nombre de guitares fabriquées annuellement est limité (une douzaine) et leur vente conditionne notre survie.

Quels sont les luthiers que vous admirez le plus ?
Je parlerais de Daniel Friedrich, Daniel Lesueur, Dominique Field, Michel Donadey, Antonio Anoyo, Richard Caro.
En Espagne, Fleta, Marin Montero et Hinues (hollandais installé à Grenade).
Aux Etats Unis: Humphey, le luthier des frères Assad.
Sans oublier en guitare manouche, Jean Pierre Favino et Maurice Dupont.

Comment ont évolué vos instruments depuis votre première guitare ?!
Beaucoup de choses ont changé comme la qualité des bois utilisés, la configuration des barrages, des voûtes...
A force de prendre des notes pendant la construction, le travail est devenu plus précis et les résultats progressent!

Vous arrive t-il de faire de la restauration ?
Oui j'en ai fait beaucoup; parfois on apprend des choses mais une bonne partie des travaux devient vite rébarbative.
Je pense que beaucoup de luthiers souhaitent limiter leurs travaux de restauration pour se consacrer à la création.

Comment " décorez " vous vos guitares ?
Les décorations multiples, incrustations sont rares sur guitares classiques, ce n'est pas trop dans la tradition. De même pour les guitares de Jazz manouche, généralement sobres. Le choix de filets, de teintes de bois, de vinages se mariant... Je travaille dans ce style de recherche pour l'esthétisme de mes guitares.

Quels sont les moments les plus excitants du métier ?
Le premier c'est quand je "ferme la boîte" (table fond éclisses) avec le manche.
Puis c'est au moment de monter les cordes et de mes premières sensations en jouant.
Voir un client heureux avec l'instrument est également une des grandes joies du métier.

Souhaiteriez-vous augmenter la taille de votre entreprise, embaucher du personnel avec ce qui s'en suit ?
Pour l'instant, je préfère garder cette dimension; bien sûr il me faut penser à produire plus efficacement, mais la moyenne entreprise ne fait pas partie de mes projets; je pense que tout le monde n'est pas fait pour ça.

Et l'Avenir ?
Pourvu que ça dure, je touche du bois !

Antoine Leroy

Archives des dossiers luthiers