La lutherie en guitare acoustique à cordes aciers
communément appelée guitare folk ne compte qu'une
demi-douzaine de professionnels en France. Parmi les plus grands,
Alain Quéguiner réalise depuis prés de 18 ans
des guitares exceptionnelles caractérisées par une
sonorité unique et personnelle.
L'interview suivant a
été réalisé à partir d'extraits
de :
- Site officiel d'Alain
Quéguiner : http://www.alain-queguiner.com/
- Guitar & Bass
septembre 1999 banc d'essai de la Jumbo 9906 (Jumbo Custom) par
Olivier Boasson
Quel est votre spcécialité
?
Je ne fais que de la guitare folk, six ou douze-cordes
Vos essences favorites ?
Aucune, parce qu'il y en a pas une qui soit objectivement meilleure
que les autres. Visuellement, le palissandre de Rio, le koa et l'érable
ondé sont particulièrement beaux. Le palissandre est
l'essence la plus polyvalente. Elle fonctionne aussi bien pour le
blues que pour le folk ou la country. L'érable me paraît
plus indiqué pour le jazz.
Electroniques favorites
?
Quand mes clients désirent une guitare électro-acoustique,
je les dirige vers les électroniques EMF, fabriquées
en Finlande. Leur micro fait 3/10èmes de millimètres
d'épaisseur et se rapproche du système à condensateur.
Finitions favorites ?
Des vernis cellulosiques
uniquement, en satiné ou brillant selon les désirs
du client. On a beaucoup dit que ces vernis marquaient quand on
plaçait la guitare sur des stands, mais je sais que ce phénomène
est dû au caoutchouc employé sur les stands autant
qu'au vernis lui même. Rien de tout ça ne se produit
sur les stands que j'utilise actuellement.
Combien de guitares
avez-vous fabriqué à ce jour ? (23/11/1999)
Environ 215
Combien de temps passez-vous
par guitare ?
La fourchette se situe
entre quinze jours et un mois selon les décorations. En travail
effectif naturellement ; il faut y ajouter deux semaines de séchage
pour le vernis. Pour un modèle très décoré
avec arbre de vie sur la touche et nacre tout autour de la caisse,
on peut en effet compter un mois.
Lorsqu’un musicien
vous commande une guitare, j'imagine qu'il expose son style de jeu,
ses goûts et ce qu’il aimerait avoir. De quelle façon
intervenez-vous en tant que conseil ?
Je vais d’abord le laisser
tranquillement essayer plusieurs modèles aussi longtemps
qu’il le désire. Ensuite, en fonction de son style de jeu,
je vais lui proposer les essences qui me paraissent le mieux adaptées.
A quelqu’un qui recherche la puissance avant tout, l’épicéa
et le palissandre s’imposent. Sustain et réverbération
ressortiront mieux avec l’érable. Je conseillerai le cèdre
à un joueur qui a une attaque délicate et qui recherche
l’expressivité.
Arrivez-vous à
percevoir une certaine sensibilité dans la personnalité
du jeu du musicien et imaginer autre chose que le choix sur lequel
il s’est arrêté ?
Ca arrive mais tout dépend
du guitariste. Certains sont un peu intimidés et mettent
du temps à s’exprimer. Dans ce cas, je travaille dans mon
coin en les écoutant discrètement !
Quels sont, pour vous,
les moments les plus intenses de votre métier ?
Quand je monte les cordes,
naturellement. C’est vrai que c’est un peu bateau de dire ça,
mais les premiers accords d’une nouvelle guitare, c’est vraiment
un moment important. La première chose que je fais le lendemain,
c’est bien sûr de vérifier mes impressions de la veille
! Il y a aussi les rencontres avec des musiciens qu’on aime bien.
On a des moments de fierté en voyant nos guitares sur scène
: c’est un peu l’aboutissement de notre travail.
Dans une guitare, quelle
qu’elle soit, on juge bien entendu le son mais aussi l’esthétique.
Quand on lit les bancs d’essais, on s’aperçoit que ce critère
est aussi pris en compte…
Lorsque j’ai présenté
mes guitares à Le Forestier,
j’étais dans la salle, les modèles étaient
sur scène. J’ai vu sa réaction ; il a regardé
les guitares d’abord de près puis il s’est reculé.
Il m’a tout suite parlé de la forme qui lui plaisait (forme
Jumbo Quéguiner).
Quels sont les luthiers
que vous admirez le plus ?
Il y en a beaucoup à
citer. J’ai beaucoup d’admiration pour Lowden : il a créé
un instrument très personnel, très européen
: nouveau barrage, forme originale, filets en bois au lieu du plastique
des Américains, vernis satiné et surtout une nouvelle
sonorité. Gurian aux U.S.A avait, lui aussi, une forte personnalité,
John Gréven Monteleone et tous ceux qui ne se contentent
pas de faire des copies de Martin ou Gibson. En France , j’aime
beaucoup le travail de Fouilleul et de Montassier ainsi que celui
de Cheval, naturellement.
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