MICHEL YVES
KOCHMANN : UNE GUITARE, UN CITOYEN.
Depuis plus
de 20 ans, il accompagne en studio les plus grands noms de la musique
Française, foule le sol des scènes les plus prestigieuses,
ses nombreuses guitares collées au corps. Variété
chic, mâtinée de rock ou de jazz, il jongle avec tous
les styles. Aujourd'hui, Michel-Yves Kochmann sort un 6e album solo
dans lequel il rend hommage à son instrument de prédilection,
l'occasion de revenir sur un parcours riche et ecclectique.
Le
ticket d'entrée du concert de Police au stade de France,
trace du récent passage Parisien du groupe de Sting, trône
sur une étagère. Michel-Yves Kochmann interrompt une
visite sur le site internet de Keith Richards pour nous parler...Pas
de doute, le monsieur n'est pas guitariste parce qu'il n'a pas pu
devenir cuisinier. Nous sommes face à un vrai passionné
de musique. Un passionné de musique mais pas de bruit. Surtout
pas celui qu'on pourrait faire autour de lui. " Être
en première ligne et répondre à un interview
n'est pas mon truc. Je ne suis pas très à l'aise dans
ce genre d'exercice! ça me va très bien d'être
sur le côté et de venir devant de temps en temps comme
sur scène" annonce-t-il. Nous voilà prévenus...Pourtant,
on a du mal à le croire à en juger par le débit
de parole fleuve, et le propos limpide.
Si son nom ne vous dit rien, ses guitares ont forcément résonné
dans vos oreilles un jour ou l'autre. Depuis plus de 20 ans, il
promène ses riffs, son allure décontractée
et son regard perçant sur les plus grandes scènes
Françaises. Il a distillé les notes de ses telecaster
ou autres gibson aux côtés d'Alain Souchon, Laurent
Voulzy, Jane Birkin pour ne citer qu'un échantillon de ses
collaborations.
Flash back. Le 6 novembre 1962, ses parents ont la primeur d'un
son autoproduit avec instrument naturel : son premier cri. Enfance
à Mulhouse, dans une famille originaire d'Europe de l'Est.
A l'époque où les petits garçons manient les
soldats ou les trains électriques, lui passe des heures sur
les orgues électroniques ou les guitares électriques
des amis de ses parents chez qui ils sont invités. "
Je m'éclatais vraiment " se souvient-il. A tel point
qu'il réclame des cours." Ma mère m'a proposé
d'étudier la guitare, mais si ça avait été
le piano, j'aurais dit oui. J'en ai aussi fait par la suite, mais
je suis un piètre pianiste ". Nous sommes en 1971. Il
souffle sa neuvième bougie et reçoit en cadeau sa
première guitare et son premier cours. La maman confie son
musicien en herbe à Patrick de Belleville, professeur de
guitare classique avec qui elle travaille pour des lectures de poésie.
" Un excellent pédagogue. C'est lui qui m'a vraiment
donné l'amour de l'instrument " Après deux années
de cours privés à Orléans, le conservatoire
national de Tours lui ouvre les portes d'une formation classique.
A la maison, plusieurs styles musicaux cohabitent. Ferré
ou Brassens dans la chambre de ses parents. Les Stones, Dylan, Led
Zeppelin, Clapton, Cat Stevens, Jimi Hendrix ou les Beatles dans
celle de son frère aîné....Le petit prodige
se nourrit de ce mélange. S'enferme parfois dans sa chambre
pour savourer quelques moments de spleen en dévorant "
la case de l'Oncle Tom " avec " Let it be " en fond
sonore. Durant cette période, Michel-Yves Kochmann se découvre
une passion pour la bande de Mick Jagger et surtout, pour son guitariste
Keith Richards, un de ses modèles. Cette culture anglo-saxonne
s'entrechoque avec sa formation classique. " Je pensais que
guitare électrique et acoustique n'avaient aucun rapport.
J'ai réalisé à cette époque que ce n'était
pas le cas. " Son baptême du feu guitaristique survient
à l'âge de 13 ans, lorsqu'il dépose ses premières
parties sur un album de chansons à textes enregistré
par sa mère avec le contrebassiste de Brassens.
L'adolescent poursuit ses études dans une section spéciale
avec enseignement général sur la matinée, et
conservatoire l'après midi. " Le surveillant général
de ce collège, saxophoniste de jazz, avait monté un
big band avec des élèves, je suis devenu bassiste
de ce groupe au style proche de Count Basie "
Diplôme en histoire de la musique avec médaille de
solfège et de guitare en poche, il débarque à
Paris à 21 ans. C'est toujours une basse dans les mains qu'il
commence par une tournée au sein du Cirque Pinder Jean Richard.
" A cette époque, toutes les séances que j'ai
fait, c'était comme bassiste...Lorsque j'ai entendu des géants
comme Laurent Vernerey ou Guy Delacroix, je n'ai plus voulu jouer...C'est
mon ami Laurent Faucheux qui m'a poussé à m'y remettre...il
m'est récemment arrivé qu'on m'appelle pour des séances
de basse "..
La décennie
80 voit éclore le guitariste... Le requin de studio se mue
parfois en bête de scènes diverses, mais reste un papillon
voltigeant de styles en styles " Je n'ai jamais eu d'ostracisme
particulier. Jouer des genres de musiques très différentes
ne m'a jamais posé de problèmes " Des guitares
pour une chanteuse Turque. Des piano-bars parisiens comme la Périgourdine.
Des séances de musique de cirque, de films (Liberté,
Egalité Choucroûte de Jean Yanne). De la composition
pure pour les chansons de son épouse, la chanteuse Véronique
Lortal. Une tournée avec Jeanne Mas avec halte à l'Olympia.
Le soir de la première, le bassiste Guy Delacroix, lui annonce
la présence dans la salle de Michel Coeuriot, réalisateur
d'Alain Souchon, " qui cherche des musiciens ". Grosse
pression, mais examen de passage réussi. Cet épisode
marque son entrée dans le clan des cadors de l'équipe
de Souchon pour une association de plus de 20 ans. Une longue alliance
artistique au cours de laquelle avec ses camarades, ils subliment
de leurs notes l'éclat des textes du chanteur.
En 1986, l'union débute par le spectacle " chacun son
tour " où les récitals de Véronique Sanson
alternent avec ceux de l'auteur de Foule sentimentale. Trois ans
plus tard, il installe ses 6 cordes sur une tournée dont
sera issu l'album " Nickel ". En 1992, l'album "
C'est déjà ça " somnole dans les cartons
Souchonien. Michel Coeuriot offre à Michel-Yves la liberté
d'y apporter sa touche personnelle. De " Kochmanniser les guitares
", comme il se plaît à dire, non sans une certaine
fierté.
" En dehors du respect que j'ai pour l'artiste, l'homme, et
ce qu'il écrit, Souchon est quelqu'un avec qui j'ai joué
le plus de choses qui me resssemblent. J'ai pu m'adapter à
lui, en restant vraiment moi-même. J'amenais mes propres idées,
et j'avais l'impression d'être encouragé à ça.
Cela a été particulièrement flagrant dans l'album
" C'est déjà ça " Quand je tombe
sur un titre en radio par hasard, je me dis que ce sont des parties
de guitare qui m'appartiennent...J'ai autant adoré travailler
avec Voulzy, mais je jouais ses parties à lui, que je trouve
magnifiques...Avec Souchon, guitaristiquement, je me mettais bien
sûr au service de ses chansons, mais avec le sentiment que
plus j'allais vers mon univers, plus ça collait avec le sien...c'était
très agréable.. "
L'album sorti en 1993 connaît un triomphe. Le public commence
à associer le nom de Souchon à celui de Kochmann.
Le dobro de " L'amour à la machine ", c'est lui.
Le oud de " C'est déjà ça " c'est
encore lui. Suivront " Au ras des pâquerettes "
en 1999 et " La vie Theodore " en 2006 avec tournées
dans des salles pleines à craquer. Michel-Yves coule des
riffs heureux. " J'veux du live " qui traverse la France
en 2002, lui donne l'occasion de retoucher à un piano sur
deux titres. Lors de la dernière tournée de 2006,
ce fan de matériel, capable de passer des heures dessus,
fait sonner un r'baba sur " la vie Theodore ", instrument
déniché lors d'un voyage au Soudan une dizaine d'années
auparavant.
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