JC - Vous souvenez-vous de guitares
qui vous ont marquées ?
DA - Oui, il y a eu deux ou trois
guitares, comme cette Gibson 00 que j'ai prêtée et
que je n'ai plus jamais revue. Ma première Hofner et une
Guild D30 12 cordes que j'ai remplacée par la guitare d'Alain
Quéguiner. Il y a une L 45 demi-caisse avec une table légèrement
bombée.
JC- Sur scène et en studio quelles
guitares utilisez-vous ?
DA - La guitare qui m'a toujours accompagnée sur scène
comme en studio c'est une Yairi copie D-45 montée avec des
cordes 52 - 42 - 32 un 20 non filé - 14 - 11. Ca me donne
une clarté en même temps des basses assez rutilantes.
C'est une guitare très polyvalente. Yairi, c'était
deux luthiers japonais, des vrais luthiers. J'ai trouvé cette
guitare dans un magasin en Belgique dans les années 70 et
depuis je tourne toujours avec. Je ne l'ai pas fait électrifiée
et j'ai demandé à Alain (Quéguiner) de me reprendre
la touche... j'ai mis très longtemps avant de trouver un
luthier en qui faire confiance...avec les contraintes de bois, je
ne voulais rien perdre des qualités initiales de l'instrument,
sa clarté, son équilibre et sa polyvalence. C'est
une guitare très polyvalente car je peux jouer aussi bien
du Blues que du Jazz et je peux "ramoner" aussi !!!
Je fais toutes mes chansons avec en studio et j'ai trouvé
il y a une dizaine d'années, une des dernières Yairi,
la même, que j'ai fait électrifier mais qui a mis un
peu de temps à se faire; les médiums étaient
un peu ternes mais elle a trouvé avec le temps se coté
"cuivré" de la première. Je l'utilise pour
les concerts. Je suis assez fidèle à ces Yairi, j'ai
joué sur des Martin de toutes sortes mais Martin sonne trop
Martin, c'est trop typé. C'est pas moi qui joue la guitare,
c'est la guitare qui me joue. J'ai pas trouvé une Martin
qui ne me fait pas penser à Neil Young !
Le son californien, je ne dis pas que je ne l'aime pas mais on l'a
trop entendu ! Cependant, Neil Young, avec son jeu, a réussi
à dépasser la Martin...
JC - Quelle est la place de la guitare
dans vos compositions ? Est-elle active, peut-elle vous inspirer
ou est-elle simplement un instrument d'accompagnement?
DA - Je pense un peu "informatique".
Il y a des clés, des points clés et la guitare ou
un accord peut me donner des points clés. Par exemple sur
" Send my body home " de l'album "Approche-toi",
c'est le premier accord qui m'a inspiré tout le reste. Donc
une chanson peut être le développement d'un accord.
Mais sinon, je travaille quand même souvent en dormant !!
Je veux dire par là que c'est le matin que se dessine un
bout de chanson... une chanson doit passer par le filtre de la mémoire
c'est à dire toutes les influences digérées,
j'ai écrit plus de mélodies en rêvant qu'en
cherchant sur ma guitare. Une mélodie passe par le chant
"interne" et rectifie un chant trop travaillé,
trop écrit. Une chanson ne s'écrit pas, une chanson
se rêve. Elle doit venir de la nature du corps et de la mémoire
lavée après avoir été imbibée.
Et ce qui reste, c'est la culture... la culture c'est ce qui reste
quand on a tout oublié, même la guitare. Et j'écris
à la fin, c'est un travail de pure mémoire. Je peux
mettre deux ou trois ans avant de me satisfaire d'une chanson. J'ai
des chansons en tête que je n'ai pas encore retranscrites
sur papier. Je suis tout le temps en train de discuter avec mes
phrases avec mes mots... c'est un peu comme l'Amour, on est toujours
avec la même personne, c'est pas toujours bandant d'être
sans arrêt avec les mêmes mots. On s'endort, on se réveille
toujours avec les mêmes, c'est pas toujours le grand Amour,
c'est aussi une lutte.
JC - Même s'il y a une régularité
dans vos sorties de disques, n'y a-t-il pas eu un temps de ras-le-bol
?
DA - C'est la hantise, la hantise..
Ca me rappelle le bluesman Robert Pete William avec qui j'ai enregistré
un disque live "ferraillage"; c'était peu de temps
avant la fin de sa vie. Il parlait d'une maison hantée, il
disait "the house was hanted", il était déjà
un peu ailleurs et c'est un peu ce qui je vis, j'ai l'impression
de vivre dans une maison hantée. Il faut arrêter un
peu d'assimiler la poésie à la jolie formule poétique
pour sa belle, la poésie exprime tous les Malaises de la
vie aussi. Un refrain c'est terrible, c'est comme les impôts
!! Ca revient tout le temps, donc il faut que ça revienne
parfois autrement. Il faut faire varier les plaisirs. !!! La répétition
rend fou : "la goutte ne rend pas fou en tombant fort mais
en tombant souvent" !!!!
Un peintre peint son tableau, il le range ou il le vend, nous, on
doit repeindre le même tableau tous les soirs lors des concerts
!!
JC - Quel est ton sentiment lorsque
tu entends certaines de tes chansons reprises par d'autres chanteurs,
comme le père UBU interprété lors de Sol en
Si 98 par Maxime le Forestier et Francis Cabrel ?
DA - D'abord je voudrais dire que Francis
Cabrel est celui qui exploite le mieux la partie lutherie de la
guitare, il enregistre je crois sans effets ou avec très
peu. Il fait partie pour moi des " guitares " presque
reconnaissables même s'il en utilise beaucoup !! Pour la chanson
qu'ils ont repris lui et Maxime, je devrais leur dire "Merci"
mais je dis surtout merci aux enfants qui ont pris mes chansons
lors des colonies de vacances.
JC - Quels sont tes projets ?
DA - J'écris peu mais j'écris. J'ai beaucoup de chansons,
j'ai un disque en anglais, un disque pour enfant que j'ai sous le
coude et qui attendent là depuis quelques années.
Donc d'un point de vue discographique j'ai encore de la réserve
et je continue à écrire... par ailleurs, je vais faire
une tournée " pop culture " avec des dessinateurs
en 2001. En ce moment, ils sont une vingtaine du monde de la BD
et planchent sur les chansons à illustrer. Et donc l'ABCD-Rom
que je vais sortir en Janvier, présentera les illustrations
des chansons
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