Jean-Philippe Nataf,
c'est un Innocent.
Aux mains pleines.
Aux mains pleines de talent.
A une époque, c'était un jeu de main pas vilain avec
Jean-Cri, Innocent lui aussi.
Aujourd'hui, Jipé apporte un album, solo.
Tout rompre, définitivement, c'est du sensationnel, pas réel.
C'est pourquoi, naturellement, sûrement, on entend Bernard
Viguié à la basse ou au ukulélé, Christopher
Board et Bertrand Bonello aux claviers et Michael Rushton aux percussions.
Innocents compères.
Et d'autres qui fusionnent parfaitement avec cette atmosphère
" ex " : Albin de la Simone, Kim Fahy pour ne parler que
de ceux qui manipulent la 6 cordes.
Comme la plupart de mes disques préférés,
j'ai détesté " Plus de sucre " à
la première écoute.
Et puis il est devenu peu à peu obsédant. Ce disque
appelle l'oreille, demande à l'auditeur de se poser. A l'antithèse
de la vie moderne, on ne consomme pas le disque de Jipé Nataf.
On ne le met pas à fond le samedi soir pendant un dîner
avec les potes. On se le garde pour des moments à soi, comme
un bon bouquin. Enfin, on fait ce qu'on veut.
J'avoue avoir été surpris
par ce côté intimiste. Un peu noir.
Et comme la plupart de mes disques préférés,
je découvre à chaque écoute un nouveau détail
musical croustillant : cet album regorge de finesses. Pas d'exubérance
ici. C'est riche et il faut le découvrir.
" Tout doux ", le titre qui
ouvre l'album rappellera l'humeur des Innocents avec un traitement
de son différent, qui annonce la couleur du disque.
Quand on aime Paul Mc Cartney, comment ne pas aimer " Mon ami
d'en haut " ? Avec un son de guitare acoustique comme j'aime
(tout comme celui de " Enveloppe ", Simon et Garfunkel-ien)
! Et un texte qui me fais me demander si TF1 est une chaîne
bien réelle ou bien si je rêve
Qui sont les martiens
dans cette histoire ?
La petite boucle rythmique de " Jean-Philippe " a une
petite saveur EVERYTHING BUT THE GIRL bien agréable, et j'avoue
qu'avec ses guitares vibratos au son 60's, c'est mon titre préféré.
Ah, pardon, mon autre préféré c'est "
Je mange mal " avec un refrain ascenseur et un groove redoutables.
Echange " Rengaine " de 7'18 '' contre rengaines de 3'10''
diffusées à outrance sur les ondes et dans les supermarchés.
Un final digne avec " Le consentement ", et comme la boucle
est magistralement bouclée, je me lève et je remets
au début.
Un dernier mot pour dire que les scores
de ventes de disques justifient la poursuite d'une carrière
pour un artiste ou un groupe, aussi bon soient-ils. L'industrie
du disque ne veut toujours pas regarder ses problèmes en
face et on envoie par dessus bord des gens talentueux. Je ne parle
même pas des gens talentueux qui ne sont jamais parvenus à
monter à bord de cette épouvantable machine. Bien
sûr nous savons que le talent et le business sont deux choses
distinctes. Et pourtant, si Jipé, en l'occurrence, n'avait
pas eu la possibilité de livrer via Tôt ou Tard cet
excellent opus, j'aurais, nous aurions, véritablement manqué
quelque chose.
Qui doit changer de comportement ? Que sommes-nous en train de perdre
réellement ?
Basta ! C'est le printemps. Prenez
une bonne résolution : régime : " Plus de sucre
"
pour tout le monde.
Nicolas Bravin pour laguitare.com
7 mai 2004
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