La
musique Celtique a inspiré plusieurs générations de musiciens
et s'exporte aujourd'hui partout dans le monde, comme le pollen.
On s'apercevoit que la Celtie depasse de loin les contrées
dites Celtiques et qu'en fait, ce terme cimente et relie bien
plus de géographie. Il est aussi difficile de parler de la guitare
seule car elle ne fait que puiser et s'inspirer de ce qui fait
la beauté de cette musique : les gens, leurs pays et leur philosophie
de la vie. Et bien que l'on voit la Bretagne, l'Ecosse, le Pays
de Galles, Ile de Mans, La Galice,... C'est l'Irlande qui est
au coeur. L'Irlande a donné naissance à un son, témoignage sonore
de l'histoire - souvent tragique - de ce pays, de son peuple et
de son héritage contemporain. Il est en effet difficile d'écouter
cette musique sans avoir envie de voir les gens. Ce souci de l'unisson
mélodique, poussé à l'extrême, dans les moindres appogiatures
et variations, reflète une volonté acharnée de rester uni et de
faire corps dans une société fraternelle qui, bien que dispersée
partout dans le monde, garde conscience de son centre de gravité.
La musique et l'église ont cicatrisé et cimenté la Diaspora Irlandaise.
Orientaux, dans leur manière d'utiliser la voix, l'espace et le
silence, dans la forme du chant a-rythmé - a capella ou pas -
qu'est le Slow Air ou Sean-Nós, expression irlandaise qui
pourrait se traduire par "ancienne façon", ou
"custom" comme disent les anglo-saxons - Je pense encore
aux pays Arabes, à l'Inde, à la Chine... - ils sont pleinement
occidentaux quand on entend le classicisme de la musique du harpiste
O'Carollan qui apporta au domaine public, dans un pays
où la tradition orale a toujours fonctionné pleinement, des dizaines
de morceaux enjoués, fournis en notes et en mélodies ciselées,
académisées et dans lesquels la rebellion et l'affirmation du
moi musical devenaient stylisées. L'Irlande a aussi sa musique
Classique. Ce n'est que ces 30 dernières années que la guitare
- acoustique et électrique - fait son entrée dans le Son Celte,
en France - pardon, en Bretagne - en Grande-Bretagne et aux USA
- elle n'arrive que timidement en Irlande. Instrument atypique,
elle y joue un rôle d'abord modeste, elle est tolérée par les
autres instrumentistes et pour rivaliser de volume avec eux, s'époumonne
dans des rythmiques endiablées, souvent alcolisées. Elle sert
de tapis, de repose-pied, de conglomérat vaguement harmonique
et mélodique sur lequel s'assoient les pipers, violonistes, flûtistes,
accordéonistes, whistles, concertinas, chanteurs et autres solistes.
Petit à petit pourtant, des étrangers vont lui donner ses lettres
de noblesse et l'amener au devant de la scène. Elle va rivaliser,
devenir soliste et courageuse, capter l'attention, le respect
et montrer qu'elle aussi, peut non seulement restituer l'essence,
l'esprit et tout ce qui fait la spécificité mélodique, harmonique
et ornementale de cette musique, mais ce faisant, lui apporter
un courant révolutionnaire, car ses serviteurs viennent souvent
d'autres cultures, ils apporteront autant qu'ils empreinteront.
Quand je pense Guitare Celtique, c'est d'abord le guitariste Anglais,
Martin Carthy, qui me vient à l'esprit.
Ce musicien a revisité et donné vie à des centaines de chansons
du patrimoine Britannique et a adapté, dans un style unique,
aux doigts, des dizaines de danses. Il s'est lui-même inspiré
du revival Folk des USA pour redonner un peu de gloire et de confiance
à l'Angleterre, saignée à blanc par les guerres, et à son folklore,débordé
par la vague Pop-Rock. Il est l'inventeur d'un style et sans lui,
je n'aurais, sans doute, pas enregistré mon premier album de la
même manière.