Voici l'histoire de la guitare par Olivier Fanton d'Andon, en vidéo ci-dessous dans les mains de Karl Marino :
"Quelques notes au sujet de ma guitare...
Tout jeune luthier et guitariste moi-même, j’ai eu la chance de me voir confier en 1978, par monsieur Michel FOUSSARD alors conservateur du Musée Instrumental du Conservatoire National de Région de Nice, la restauration complète d’une très intéressante guitare de Pierre PACHEREL faite à Nice en 1834 et «dédiée à monsieur de CESSOLE» ainsi que cela était écrit à la plume sur l’une des barres transversales de la table.
Ce luthier français, né à Mirecourt en 1803, après avoir séjourné à Gênes puis à Turin chez le maître luthier Gian Francesco PRESSENDA, s’installa définitivement à Nice, alors encore italienne, dans les années 1830 et y mourut en 1871.
Il construisit aussi bien des violons, altos, violoncelles que des guitares.
Le modèle de guitare dont il s’inspira était très caractéristique de la facture turinoise du XIXème siècle, dans la lignée des GUADAGNINI et autres maîtres de l’école italienne de cette époque, et d’une conception très éloignée de celle des modèles français et espagnols qui, par la voix du luthier espagnol Antonio de TORRES notamment, allait définir les canons de la guitare contemporaine.
J’ai été étonné et séduit par les qualités de timbre inouïes de cet instrument ressuscité qui fit l’objet en 1980 d’un enregistrement discographique, avec trois autres guitares de la collection du Musée du CNR de Nice, dans le cadre de l’édition du livre « Guitares, Chefs d’œuvre des Collections de France » (Editions La Flûte de Pan, préface de François LESURE, Conservateur du Département de la Musique à la Bibliothèque Nationale).
Pour l’anecdote, l’ingénieur du son lui-même, après avoir réglé ses appareils pour les trois autres guitares (TESLER-1618, VOBOAM –c.1650, DELEPLANQUE-1771), avait dû modifier ses réglages pour l’enregistrement de la guitare de Pierre PACHEREL du fait de l’extraordinaire dynamique de cet instrument.
Il m’a semblé alors très motivant d’orienter mes recherches en facture de la guitare classique dans cette voie, à ma connaissance oubliée et inexplorée à cette époque.
Je chercherais et trouverais « mon » son, qui me ressemblerait un peu…
Cette guitare, italienne, se distingue principalement par une table d’harmonie assez fortement cintrée qui, en même temps que l’intérêt de sa qualité sonore, présente l’inconvénient de la relative complexité de sa facture où l’on pourrait entrevoir une des raisons de son éclipse.
J’ai alors expérimenté à la toute fin de l’année 1980 et au début de l’année 1981, en soumettant mes résultats à madame Ako ITO et à monsieur Henri DORIGNY, professeurs de guitare au Conservatoire Nationale de Région de Nice, un modèle de guitare contemporaine dans la filiation de cette lutherie italienne …et niçoise.
Mes expériences ont toutes été conduites sur un seul instrument terminé, prêt à jouer, à table cintrée sous laquelle n’avait été placé – en dehors des grosses barres transversales de part et d’autre de l’ouie – aucun barrage de quelque forme que ce soit (éventail ou autre).
J’avais observé que des harmoniques intéressantes apparaissaient, durant la vibration des cordes, lorsque certains points précis de la table étaient en quelque sorte « bloqués » par l’appui d’une petite barre de bois.
J’ajustais à la craie et collais alors à ces différents endroits, sur la face externe de la table, des petites barres d’épicéa refendu puis notais l’évolution de la sonorité et du timbre selon que ces barres étaient soit déplacées, soit affinées, soit raidies, soit raccourcies, rallongées, éliminées etc.
Mes amis Ako ITO et Henri DORIGNY, avec leur talent de guitaristes, exploraient à fond l’univers sonore de l’instrument à chaque étape de l’expérience.
La présence du chevalet m’a interdit d’emblée de m’orienter dans la voie du « traditionnel » barrage en éventail.
Je précise qu’aucun appareil scientifique de mesure n’a été utilisé dans la conduite de ces expériences, cette démarche fondamentale se justifiant par le fait, évident, que l’interprète et le luthier s’adressent à la sensibilité musicale de l’auditeur mélomane et en aucune manière à une machine de mesures physiques, aussi performante soit-elle.
Le premier instrument prototype fut construit en 1982 et présenté, inachevé de peu, hélas, à la XVIème Exposition Nationale du Travail – Concours des Meilleurs Ouvriers de France où il suscita le commentaire du jury qui figure en fin de page.
Depuis, en constante évolution tant sur le plan de la structure que de la technologie, mes guitares ont conquis un nombre croissant d’amateurs éclairés et de concertistes réputés parmi lesquels la guitariste grecque Antigoni GONI, professeur de guitare au Conservatoire Royal de Musique de Bruxelles et le guitariste et compositeur français Roland DYENS, professeur de guitare au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, qui poursuivent des carrières internationales avec mes guitares.
Commentaire du jury à propos de mon œuvre présentée à la XVIème Exposition Nationale du Travail – Concours des Meilleurs Ouvriers de France, Paris, septembre 1982.
Président : René QUENOIL, luthier facteur de violons, Meilleur Ouvrier de France.
Vice-président : Daniel FRIEDERICH, luthier facteur de guitares.
« Œuvre très sérieuse mais expérimentale tentant de réunir une forme actuelle avec un fond à côtes et éclisses d’époque XVIIème siècle.
La réalisation technique, la qualité de la marqueterie sont exceptionnelles.
Le bon goût présenté dans le choix des bois et le jeu des couleurs est digne des plus vives félicitations.
Le concurrent fait étalage de qualités et de possibilités rares.
Le jury unanime lui présent ses félicitations et encouragements à préparer une guitare terminée, répondant aux normes exigées, pour la prochaine exposition où il a toutes chances de remporter la plus haute distinction »
En juin 1986 les bons augures du jury se réalisaient et j’obtenais le titre de « Un des Meilleurs Ouvriers de France – Médaille d’Or du Travail » à la XVIIème Exposition Nationale du travail – Concours des Meilleurs Ouvriers de France, Paris, « premier nommé, et de loin », selon la confidence reçue de monsieur René QUENOIL lui-même.
« Au soir d’un récital où ma guitare d’alors révélait quelques signes de lassitude – nous sommes en février 94 – j’ai rencontré une guitare, une très belle guitare dont j’eus envie de faire plus ample connaissance, quelques heures plus tard, dans le contexte-vérité du public et de la scène.
Pendant le récital, j’ai tôt compris que cette guitare serait la mienne et depuis, l’instrument du luthier français Olivier FANTON d’ANDON ne m’a plus quitté. Coup de foudre.
Ce que j’aime en cette guitare s‘explique avant tout par la quasi-perfection de son alchimie entre rondeur et clarté, deux paramètres dont la cohabitation, jusque là, m’avait davantage semblé tenir du rêve impossible que d’autre chose, presque de l’antinomie.
Elle existe donc et je l’ai rencontrée.
Légère, facile à jouer, précise et extrêmement sensitive, la « guitare nouvelle » d’Olivier FANTON d’ANDON, bien loin de cette vieille lune qu’est la prétendue puissance de notre instrument, n’est autre qu’un arc-en-ciel sonore »
Roland DYENS
Ville d’Avray, décembre 1994.
« … My guitar ? Olivier Fanton d’Andon, from à French guitar maker from Châteaudun (France).
It’s a wonderful spruce blond guitar I « met » by accident in 1994, right before to play a concert.
I twas such a huge « coup de foudre » (French expression that means to fall in love at first sight) that I decided to perform the concert 2 hours later on that guitar.
Almost 15 years after I’m still thinking this guitar was really made for me.
It’s a very special and perfectly balanced instrument.
Sounds like a piano somehow with, all together, incredibily deeps bases + crystal like trebles ; It’s a rare guitar I think (but better to stop saying great things about my guitar : Somebody might steal it some day).
Roland DYENS