Laguitare.com
: Quel a été ton parcours pour devenir luthier ?
Didier Duboscq : Alors mon parcours c'est comme la plupart
des luthiers de ma génération et de celle d'avant en
fait. Il est totalement atypique, c'est à dire que je viens
d'un BEP de menuiserie/ébénisterie avec une option de
fabrication industrielle. Dans cette option, il y avait un travail
axé sur les machines outils, la mécanique, l'électronique
et la pneumatique et tout cela m'intéressait dans le sens où
quand tu travailles sur une machine et que celle-ci tombe en panne,
si tu n'es pas capable de la démonter, qu'est-ce que tu fais
? Donc, ça me paraissait important de savoir le faire. J'ai
donc pris cette option en ayant l'arrière-pensée que
jamais je ne travaillerai dans une usine, ni même dans un atelier
d'ébénisterie parce qu'en fait je me suis toujours senti
luthier, sans même le savoir vraiment. A 9 - 10 ans je fabriquais
des guitares en carton pour les spectacles en colo.
laguitare.com : Mais tu jouais déjà
de la guitare ?
Didier Duboscq : Non, non, pas du tout, mais j'écoutais
déjà de la musique. J'ai pris ma première claque
musicale à 10 ans avec " Outlandos d'amour " de
Police qu'un oncle m'avait offert. Et là, je suis
resté collé et ça a été le début
du Rock'n'roll. Je suis de 1969, je l'ai découvert en 79
quand Police est arrivé en France et puis ça été
ensuite Toto, Supertramp, U2, enfin tous les
groupes de cette époque-là en ayant avant et en background
ce qu'écoutait mon père, beaucoup de jazz et un petit
peu de shadows. J'ai ensuite développé ma culture
rock dans les années 80. Je suis un peu passé à
côté de la culture musicale des années 70, je
m'y suis mis bien après.
laguitare.com : Tu ne jouais pas
de guitare mais tu les fabriquais déjà dans tes rêves
!
Didier Duboscq : Oui ! C'est ça, sur des cartons avec
des bouts ficelles de laine et tout ça en colo, on faisait
des faux concerts. C'est loin tout ça ! Je me souviens, après
ça m'a pris lors de ma treizième année, je
suis revenu de vacances de Pâques en disant à mes parents
: " je veux jouer de la basse " et ce n'était pas
autre chose, c'était de la basse. On est donc allés
dans le premier magasin et on a trouvé la pire pelle d'occas.
Il y en avait pour 400 Francs avec l'ampli. Elle était injouable
même pas de marque et l'ampli c'était un Novanex 6
watts. Et dans mon esprit, je pensais même que la guitare
se branchait dans le mur, directement dans la prise secteur ! (rires)
c'est pour te dire d'où je partais ! Donc, pour décomplexer
tout le monde, on peut être le pire nul de la terre et en
faire son métier après, c'est pas incompatible. (rires)
Bref, quand je suis rentré chez moi et que je l'ai essayé,
je l'ai trouvé très dure à jouer, les cordes
étaient trop hautes et j'ai décidé de la démonter.
Le soir même, j'ai tout posé sagement sur la table
de la salle à manger en prenant des notes pour savoir la
remonter ensuite. Je voulais savoir ce qu'il y avait dedans et essayer
de la régler. J'ai trouvé deux trois trucs pour la
rendre plus confortable. Ensuite je m'y suis mis à fond,
à jouer sur l'instrument. A l'époque, je vivais dans
une cité à Neuilly-Plaisance avec des jeunes de mon
âge mais aussi des plus vieux qui faisaient de la guitare.
J'ai pris des cours de basse et c'était nuit et jour que
je travaillais ! C'est la période de ma vie où j'ai
le plus progressé à la basse. Et très vite
j'ai fait de la musique avec beaucoup de jeunes de ma cité
et je rencontrais beaucoup d'autres jeunes qui faisaient aussi de
la musique, il y avait beaucoup d'énergie que je retrouve
maintenant d'ailleurs. Je vois mon fils qui a treize ans, je me
retrouve beaucoup en lui. J'ai donc découvert à 13
ans l'univers de la musique, je suis passé du vélo
à la musique en six mois de temps. Et en fait, tous ces musiciens
avaient des instruments mal réglés et je me suis trouvé
à régler toutes les guitares du quartier et visiblement
j'y arrivais. Et puis j'ai commencé le lycée et là
je commençais à construire des corps en chopant des
bois de l'école.
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