Nous
avons encore une fois assisté à une soirée
magnifique dans ce vieux cinéma qu'est l'Archipel ! Connaissant
Chris Lancry, j'étais déjà sûr
de deux choses : les instruments traditionnels seraient présents
et sa guitare, une Collings CJ de 2003 serait sonorisée avec
un micro devant la rosace (mixé tout de même avec un
piezo). Chris est un amoureux des vieux sons, des sons purs et nous
avons été gâtés car l'acoustique est
reine ce soir !
Ce concert déborde d'histoires et d'Histoire, il suffit de
fermer les yeux pour s'imaginer sur une vieille route poussiéreuse
du sud des Etats-Unis en route vers le Mississippi. C'est comme
si on y était ! Vieux Blues traditionnels, country-blues,
bluegrass, picking, folk et Ragtime...
L'invité totalement surprise car non prévu était
Percy
Copley à la mandoline Blue-grass qui nous offre d'entrée
deux morceaux "Polecat Blues" et "All Night Long"
dans la tradition des "Strings bands" des années 20 à Memphis. On
oublie souvent que ce style, qui a précédé le blues était LA musique
noire par excellence au début du xxème siècle. Le ton est donné
et tous les musiciens accompagnent Percy car la formation, contrairement
aux autres concerts, sera assez homogène avec deux guitares
acoustiques, une contrebasse, une mandoline, un banjo ou dobro en
lap-steel et un violon.
Suivent ensuite "Red haired boy" et "June Apple"
2 Fiddle Tunes traditionnels qui sont devenus des classiques du
bluegrass. Avec le violon de Dany
Vriet, c'est la mandoline de Percy et le banjo de Jean-Yves
Lozac’h qui se taillent la part du lion. A la guitare, flatpicking
de rigueur.
Le banjo sonne sur "Foggy Mountain Breakdown" (Earl Scruggs)
un grand classique du banjo. C'est aussi la musique du " Bonnie
& Clyde " d'Arthur Penn.
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Chris Lancry,
Pascal Lasnier, Percy Copley
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Chris Lancry
et Pascal Lasnier
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Comme à chaque concert, l'humour
est au rendez-vous et entre Chris et Michel
Ghuzel nous sommes servis ce soir. C'est ce dernier qui
va apporter une touche originale à cette première
partie en chantant "Oh Pato" une bossa nova de Joao Gilberto.
Une bossa accompagnée d'une mandoline, d'un violon et d'un
banjo, c'est assez étonnant et très réussi
!!
Chris Lancry nous offre ensuite une de ses compositions : "Bert
& John", un hommage à Bert Jansch et John Renbourn,
2 figures mythiques de la guitare acoustique britannique de la fin
des sixties. Maginifique ! le moment le plus émouvant de
la soirée. L'improvisation a son tapis rouge avec "Randy"
de Chris Lancry. Un mélange de ragtime et de blues. Un thème et
une grille qui permettent à chaque musicien de s'exprimer librement.
Chris est un vrai chef d'orcherstre avec ses compagnons. Il les
appelle pour un solo ou annonce le break avec le nom de l'accord
ou avec un "one more time" pour relancer la mesure. Il
est comme un poisson dans l'eau et toujours heureux à la
fin de chaque morceau, sourire aux lèvres. Sa guitare est
collée contre le micro et j'ai eu peur à plusieurs
reprises que celui-ci ne finisse entre les cordes, planté
dans la rosace. Il n'hésite pas non plus, tout en jouant,
à nous conter les histoires des compositions qui défilent
sur scène. Et ça, c'est un grand bonheur car avec
le son nous pouvons nous faire les images !
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Michel
Ghuzel et Dany Vriet
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Percy Copley
et Jean-Yves Lozac’h
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Chris passe en open de D sur sa composition
"Bessie", une évocation instrumentale de la grande chanteuse
de blues et des couleurs du Mississippi.
A l'arrière de la scène, Pascal
Lasnier reste discret mais nous offre aussi ses solos. Il
est toujours impressionant d'entendre une contrebasse se mettre
en avant dans les occasions de chorus avec ses notes suaves et profondes,
c'est un superbe instrument.
La formation acoustique nous offre ensuite "I can't keep from
cryin' sometimes" de Blind Willie Johnson, une adaptation
très libre, en open D tuning d'un grand classique de la musique
américaine.
Grand fan de Bob Dylan, Michel Ghuzel nous chante "You're
gonna make me lonesome when you go", une des grandes chansons
du poète folk. Un musicien incontournable quand on parle
guitare, blues et country.
C'est pendant la deuxième partie du concert que l'invité
du soir Michel Haumont fait son entrée avec sa fidèle
Takamine signature pour un medley picking : "Freight Train/
Farewell my blueBelle/ Doc's Guitar". Le fameux picking à deux
doigts (Pouce et index) de la musique américaine. Une technique
employée aussi bien par les musiciens blancs que les bluesmen noirs.
Ces 3 morceaux sont d'Elizabeth Cotten, Merle Travis et
Doc Watson.
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Michel
Haumont et Dany Vriet
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Chris Lancry,
Pascal Lasnier et Percy Copley
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On continue avec "Worried man",
un traditionnel, initialement interprété par la Carter Family.
Ce morceau est un des piliers du répertoire américain. La version
jouée ce soir est proche de celle de Jerry Reed. Un grand
moment avec "Bright Side Of The road" de Van Morrisson.
On l'appelait le "Belfast Cowboy". Van Morrisson est un compositeur
talentueux et un chanteur d'exception. Ses chansons peuvent facilement
être adaptées dans une formation telle que celle de ce soir. Chris
fait chanter le public qui répond vite et bien pour le refrain.
Nous n'avons pas l'impression d'être à Paris ce soir
et c'est ce qui fait le charme de ces Paris Guitare Rendez-Vous
! Encore une belle réussite que l'on doit ce soir à
Chris Lancry et son amour pour cette musique authentique qui ne
vieillit pas. Les conditions de sonorisation n'étaient pas
facile mais le résultat était parfait.
Cette soirée est l'avant-dernière de la saison car
pour la dernière notre quatuor se retrouvera rassemblé
et nous réserve deux concerts exceptionnels les 11
et 12 juin avec la présence du légendaire John
Renbourn... Je vous conseille de réserver au plus
vite !
Jacques
Carbonneaux le 18 mai 2006
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