Le son, le son... éternel sujet à controverse car subjectif et qui trouve ici un terrain favorable à un débat.
Le premier à instaurer ce débat, je le reconnais, c'est bien moi car je ne peux, comme tout un chacun, occulter ma subjectivité dans ce domaine des guitares à cordes acier qui ont des allures de guitares folk. Vous connaissez l'histoire de ma passion pour la guitare dont je vous ai livrée l'origine dans cet article dédié à la Martin D-28 qui m'accompagne aux côtés de ma Quéguiner.
Je suis donc influencé par des sonorités qui sont elles mêmes liées intimement à des courants musicaux. Cependant, mon travail et mon challenge est d'essayer de mettre de côté cette subjectivité afin d'essayer, le plus objectivement possible, de vous présenter les caractéristiques acoustiques de cette guitare qui, de fait, proposent des sonorités que je n'ai jamais entendues jusqu'ici sur ce type d'instrument.
Par contre, mon oreille qui a été modelée, formatée par le son des guitares folk me permet d'ores et déjà de dire que cette guitare, dans l'état actuel de sa fabrication, n'est pas l'instrument "le plus" approprié pour jouer en flat-picking du folk à la Neil Young par exemple. La présence de Michel Gentils pendant le test m'a cependant permis de cerner les nouvelles capacités qu'offre cette guitare.
Puissance et dynamique hors norme.
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Au centre, la caisse de la guitare. Les couleurs représentent l'intensité décibels. Le noir = 0 db et le blanc = 100 db.
Vidéo sur le site Interstices. |
Tout d'abord et c'est le point commun de tous les modèles Audirac (nylon et acier) et du modèle Ouessant Blast de Kopo, c'est la puissance.
L'attaque de la main droite se trouve déstabilisée devant autant de dynamique. Celle-ci est bien évidemment liée à la strcuture du barrage qui a pour conséquence d'offrir une table d'harmonie moins bridée que sur tous les modèles folk que nous avons pu comparer Michel et moi.
(Pour info, ces modèles que j'ai actuellement sont : Martin D-28 1967, Jumbo Quéguiner 1999, Boucher 2010 + modèles en test : OM du luthier Romuald Provost et un modèle Freshman (ces deux derniers modèles prochainement en test).
Face à autant de puissance, on peut alors comprendre que la circonférence de la bouche soit plus importante car il ne faut pas oublier que" l'essentiel de l'énergie sonore est confinée dans la caisse" (voir photo ci-contre). Si celle-ci est plus importante sur ce type de modèle, il convient alors d'adapter la taille de la bouche ou même comme le préconise Gérard Audirac d'en mettre deux au lieu d'une.
Précision et sustain.
Le jeu aux notes à notes est ici d'une très grande précision. Tout se détache distinctement, plus directement. Quant au sustain, il est long sans être interminable.
Equilibre.
Basses, médiums et aigus sont sur le même registre dans l'équilibre général de cette guitare. L'emplacement de la bouche sera cependant assez perturbant pour le guitariste quand il jouera les basses à vide qu'il recevra, de fait bien plus directement que les autres fréquences.
Voir l'étude acoustique qui montre bien ce phénomène où seules les basses ressortent de la bouche.
Les registres de jeu
Comme le dit Michel, cette guitare est accessible dans des registres d'intensité de jeu plus bas dans l'attaque (jeu doux et délicat) mais aussi dans les registres plus hauts, plus agressifs, voire très agressifs. Cependant, dans ce dernier cas, la sonorité n'est pas toujours agréable à l'oreille.
Comme vous pouvez le constater sur la deuxième vidéo, dans les mains d'Antoine Dufour, le jeu en tapping est ici tout à fait surprenant, avec une réponse supérieure, par rapport à un modèle traditionnel, quand seule la main gauche frappe les cordes sur le manche (tapping). C'est aussi le cas, lorsque vous utilisez la caisse comme percussion.
La conclusion est sans appel et la table de ce modèle réagit véritablement comme une véritable peau de percussion. Elle est tellement sensible et réactive qu'un coup bien placé fait claquer la corde de E grave sur les frettes (comme un slap en basse) sans même toucher la corde.
Nous n'avons pas réussi à reproduire ce phénomène sur les guitares traditionnelles. Frapper la table nous a permis de sentir la capacité vibratoire de la table bien plus proche de la sensation d'une peau tendue qu'une plaque vibrante.
Les couleurs sonores
Là, on aborde un point sensible car c'est ici que beaucoup ne retrouveront pas leurs habitudes. La première chose qui surprend est cet effet de basses "réverbérées" et accentuées pour le guitariste. Ensuite, c'est ce son droit, très droit, clair, brillant, froid et dégraissé à l'extrème. Etant un fan des guitares "grasses", je me retrouve ici complètement déstabilisé. Michel quant à lui l'est moins et c'est bel et bien la façon de jouer qui va apporter des nuances aux sonorités.
En effet, il est impératif d'adapter la dynamique de son attaque mais également de positionner sa main droite à des endroits différents entre le chevalet et le manche. Michel a réussi à obtenir des sonorités de gouttes d'eau que l'on a également sur une folk traditionelle mais qui est ici plus présent.
En strumming, elle est moins harmonieuse, moins ronde et moins chaleureuse que ses consoeurs traditionnelles, c'est indéniable mais pourtant les harmoniques et la rondeur sont bien là. Il suffit encore une fois de s'adapter à cette nouvelle dynamique pour les faire ressortir.
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