- Ce style demande beaucoup
de technique ?
A la main droite, oui, il y a un coup à prendre qui
demande un peu de travail pour maîtriser les rythmiques,
mais rien d'extraordinaire quand même, sinon les enchaînements
d'accords sont très simples; c'est surtout dans l'interprétation
que se fera la différence, mais ça c'est vrai
pour tous les styles !
- Qu'elles sont tes autres
influences musicales ?
Merle Travis, c'est un guitariste qui possédait un
"swing" et une musicalité incroyable, avec
une technique main droite hallucinante ! Big Bill Broonzy,
certainement le premier guitariste de Blues que j'ai entendu
et que je trouve toujours aussi émouvant à écouter.
Mais aussi, en vrac, les Beatles, Doc Watson, le Bluegrass
en général, John Mayall, ... Sans oublier François
Sciortino, que j'ai connu à Issoudun, et qui m'a fait
comprendre que je pouvais moi aussi composer ! François
est un guitariste de tout premier ordre, doublé d'un
personnage très attachant, j'aime beaucoup le rencontrer
et ses conseils me sont précieux.
- Tu possèdes des
guitares de luthier, pourquoi ce choix par rapport aux guitares
de série ?
D'abord parce que la guitare en tant qu'objet m'intéresse
au moins autant que la musique qu'on fait avec ! J'ai d'ailleurs
fait moi-même quelques essais plus ou moins réussis
( ! ) dans le domaine de la lutherie. Ensuite parce qu'une
guitare de luthier est un instrument unique, elle est telle
qu'on l'a souhaitée avec les adaptations ou les spécificités
que ne peuvent pas avoir les guitares de série. Enfin
une guitare de luthier c'est la rencontre avec un homme (ou
une femme !), sorte de magicien capable de transformer quelques
planches de bois, certes très belles mais planches
quand même, en un instrument extraordinaire de beauté
et de sonorité. Le plus incroyable est que la guitare
porte en elle tout l'esprit de son créateur, quelque
chose qui fait que personne d'autre au monde n'aurait pu faire
la même !!! Pour moi le luthier est un artiste au même
titre que n'importe quel musicien, il crée, il compose
une uvre unique dans chaque instrument.
-
La guitare a une importance pour jouer ce style ?
Oui, bien sûr, il y a des sonorités qui se prêtent
plus ou moins bien au Rag, même si on peut dire qu'en
principe on doit pouvoir jouer toutes les musiques sur toutes
les guitares! Mais pour le Ragtime-Blues tel que je le joue,
il faut des guitares à cordes acier obligatoirement,
avec le plus de précision possible dans la sonorité
et le plus de puissance possible. En six cordes, j'ai une
Fouquet "Bluette" avec table en cèdre, éclisses
et fond en acajou, qui sonne comme c'est pas permis ! En douze
cordes j'utilise bien sûr la Quéguiner, elle
a une table en épicéa, des éclisses et
un fond en érable, une vraie merveille aussi ! En fait,
j'éviterai pour mon usage personnel le son typé
"Martin" qui, s'il est parfait en Country-Bluegrass,
me parait trop "propre" pour le Ragtime-Blues. Difficile
d'expliquer ça avec des mots, il faut pouvoir entendre
les différences entre toutes les guitares.
- Tu fréquentes Issoudun
depuis combien d'années ?
J'y suis venu la première fois en 1992. J'ai dû
loupé les éditions de 1995 et 2003, à
part ça, j'étais là toutes les autres
années !
- Que représente cette
manifestation pour toi ?
A mes yeux, c'est la plus belle manifestation autour de la
guitare, la plus complète, la mieux organisée.
Bien sûr je ne suis pas allé à tous les
festivals existant dans le pays, mais je n'en connais pas
d'autres qui offrent comme Issoudun les concerts, les masterclass,
l'expo luthier (géante), les stages, l'hébergement
complet, le tout dans un lieu super convivial et dans une
ambiance de fête. Il suffit de venir avec une guitare
et tout le reste est assuré par l'équipe organisatrice...
moi je dis bravo ! Et puis après toutes ces années
un "tissu social" important et solide s'est créé
entre les participants réguliers, les organisateurs
et c'est un vrai plaisir que de se retrouver là ...
- L'esprit de son créateur,
Marcel Dadi, rôde-t'il toujours dans les couloirs ?
C'est clair. Pour ceux qui ont eu la chance de venir à
Issoudun du temps de Marcel, les couloirs résonnent
encore de ses éclats de rire !
- Que penses-tu de la programmation
de cette année ?
Excellente puisque je suis dedans !!! Sérieusement,
je pense que la programmation est très bonne, en tous
cas, elle promet de grands moments de musique, je pense à
Jacques Stotzem que j'adore, à Adrian Legg, mais aussi
à Christian Escoudé ou Popa Chubby dans d'autres
genres ! Le staff d'Issoudun réussit toujours à
nous proposer un plateau d'artistes variés et intéressants,
ça nous permet de rencontrer d'autres musiciens, d'entendre
d'autres musiques et c'est toujours riche d'enseignement !
- Celle-ci est parfois controversée
par certains puristes du picking, crois-tu que l'ouverture
sur d'autres styles soit un plus ?
Oui définitivement ! Comme je dis toujours, du mélange
naît la richesse, et c'est vrai ici aussi; il faut faire
se rencontrer les guitaristes de tous bords, c'est d'ailleurs
ce qui s'est toujours fait à Issoudun.
- Quelles sont les découvertes
que tu as faites au cours des précédents Issoudun
?
Elles sont innombrables. Je peux citer Bob Brozman, Morning
et Jim Nichols, les Manouches, les guitaristes Italiens, les
luthiers Mike Lewis et Claude Fouquet, qui est devenu un grand
ami, ... Tous les ans il y a quelqu'un ou quelque chose à
découvrir et qui mérite qu'on aie fait le voyage
!
- Quel(s) conseil(s) donnerais-tu
à un joueur de guitare ?
Je dirais qu'il faut écouter en premier lieu. Écouter
de tout, pas seulement de la guitare et pas seulement le style
qu'on aime le plus. Il y a de bonnes idées partout,
dans le Rock, le Jazz, la Variété, la Rap, la
Techno, le Musette... Ensuite il faut être réaliste
et conscient de ses propres possibilités : simplifier
un morceau pour arriver à le jouer n'est pas un sacrilège
! Je fais ça moi-même tous les jours ! Il faut
chercher la musicalité plutôt que la complexité,
et comme le dit mon ami François Sciortino, mieux vaut-il
émouvoir qu'impressionner ! C'est comme ça qu'on
arrive à se faire un son, son propre son qui devient
la signature du musicien, ce qui fait qu'on le reconnaît
dès la première mesure. Et pour ça, pas
besoin d'être capable de sortir quinze mille notes à
la seconde, une seule suffit, mais la bonne! Et comme je l'ai
dit tout à l'heure, je ne cherche jamais à jouer
un morceau comme untel ou untel, d'une part ça n'a
pas d'intérêt puisque ça existe déjà,
ensuite parce que je n'en suis la plupart du temps pas capable
! Il faut d'abord capter l'esprit du morceau et ensuite le
faire passer dans ses mains le plus naturellement possible.
Après on n'a plus qu'à penser à bien
le jouer ! Écoute Gary Davis jouer Maple Leaf Rag et
tu comprendras vite ce que je veux dire... A l'inverse il
ne faut jamais se décourager, on progresse en permanence,
même un "vieux routier" comme moi continue
de trouver de nouveaux sons, des améliorations, des
perfectionnements, et bien souvent grâce aux multiples
rencontres qu'on peut faire ici et là, comme par exemple...
à Issoudun !
Vous pouvez retrouver Antoine sur son site (http://antoine.payen.free.fr/)
et aussi retrouver, grâce à lui et deux autres
de ses compères, l'actualité du picking ainsi
que bien d'autres informations indispensables à tout
guitariste sur http://fingerstyle.free.fr/.
Ne le ratez pas à Issoudun, ce gars là est un
grand et guettez la sortie prochaine de son CD...
A'Titâ
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